Économiste, enseignant-chercheur Depuis le milieu des années soixante du siècle précédent, la politique agricole au Maroc s’était longtemps identifiée à ce qu’il convenait d’appeler « la politique des barrages ». Elle se voulait ainsi dès l’origine fondamentalement ancrée dans la problématique de l’eau. En fait, à l’époque, pour qui prenait la peine d’observer une carte pédologique, projetée sur une autre, pluviométrique, il n’était guère difficile de faire le constat suivant: Dans l’ensemble, le pays n’était pas seulement semi-aride, mais aussi en prise avec un redoutable paradoxe: alors que la pluviométrie diminue selon un gradient allant du Nord-ouest vers le Sud-est, la qualité des sols, elle, se dégrade à mesure que l’on remonte des riches pleines du Souss ou du Haouz vers les monts et les plateaux du Nord et du Nord-est. Autrement dit, et en forçant un peu les traits, là où il pleut, les terres sont plutôt de qualité moyenne ou médiocre, et là où c’est l’eau qui manque, les sols sont plutôt de bonne qualité… Ce à quoi il faut encore ajouter le fait que 51% des précipitations sont concentrées sur seulement 7% du territoire national, plus exactement dans les bassins du Loukkos et du Sebou, dans le Nord du pays[1]. Difficile dans ces conditions de considérer que le pays a naturellement une “vocation agricole”.Et pourtant, c’est bien ce que les gouvernants, fortement “conseillés” par les Institutions financières internationales (Banque mondiale en tête), vont solennellement décréter. Les plans nationaux de développement qui s’étaient succédé à partir de 1965 vont, en vertu de ce postulat, ériger l’agriculture en secteur prioritaire. Il ne s’agira cependant que d’une certaine agriculture, principalement exportatrice, et avant tout adossée à une “politique des barrages” qui accaparera la plus grande part des ressources du pays. D’où cet autre paradoxe, vécu avec de plus en plus d’acuité ces dernières années : Après avoir investi tant et tant et pendant tant d’années dans l’effort de maitrise de l’eau, le pays se trouve aujourd’hui en quasi-pénurie hydrique[2], acculé à faire face à une crise de l’eau comme il n’en avait jamais connu ! Le paradoxe est que le pays dispose aujourd’hui de près de 150 grands barrages, mais que les dernières statistiques officielles nous disent qu’ils sont aux trois quarts vides ! Et pour cause puisque, selon le Chef du Gouvernement, « la période entre 2018 et 2022 reste parmi les périodes les plus sèches de tous les temps », avec un volume de précipitations « le plus faible - en cinq années consécutives- dans l'histoire du Maroc »[3]. Le paradoxe encore est que, au bout de plusieurs décennies d’une coûteuse politique d’irrigation, ce sont encore les précipitations et partant les aléas climatiques qui continuent de rythmer les campagnes agricoles et partant l’évolution de l’ensemble de l'économie du pays, avec des taux de croissance qui peuvent tomber à 1% ou remonter à 4% selon que le ciel a été clément ou dément avec nous !
Certes, les changements climatiques et les sécheresses de plus en plus fréquentes et de plus en plus intenses apportent une part d’explication essentielle à cette évolution. Mais notre propos ici est de nous demander si, au-delà des caprices du ciel, « l’autre part » n’est pas due à des choix irrationnels, faits ici-bas, sur terre, par des responsables qui ont manqué, par-dessus tout, simplement de bon sens.
Nous commencerons par prendre connaissance des choix fondateurs du modèle agricole qui a prévalu à ce jour, puis nous verrons comment la crise actuelle de l’eau puise ses racines dans des politiques qui, en plus d’être de classe, sont « irrationnelles ». Conduites depuis bien longtemps, en tout cas bien avant le « Plan Maroc Vert » et la nouvelle « Stratégie Génération Green », elles ont été amplifiées par le premier, à un niveau inédit, quasiment absurde. Nous pourrons alors en analyser les effets néfastes sur la sécurité hydrique du pays, notamment lorsque, à des politiques irrationnelles, sont associées des pratiques délictuelles. Nous suggérerons en conclusion quelques idées et pistes alternatives, à tout le moins à même de mieux mettre en cohérence les choix de politique agricole et la réalité de la ressource hydrique dans notre pays.
1. Choix fondateurs et logique « hydrique » du modèle agro-exportateur
Au début des années 1960, le Maroc connaît une crise financière aigüe, se traduisant par des déficits budgétaires et externes lourds, une pénurie des réserves de change... Le roi Hassan II, qui s’active pour imposer le régime autoritaire que l’on sait, cherche des alliances et des soutiens externes. Il fera donc appel au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale, dont les équipes d’experts et de consultants débarquent et s’installent alors durablement dans le pays. Les rapports qu’ils rédigeront et les « recommandations » qu’ils feront dessinent le contenu du « modèle de développement » qui commence à prendre forme dans l'agriculture marocaine.
Délaissant toute réforme de structure, ce « modèle » repose sur deux concepts majeurs qui sont la modernisation et la rentabilisation, l’un et l’autre se voulant d’ailleurs procéder d’une approche plutôt « technique » que « politique ». La stratégie de l'État dans l'agriculture s'identifie dès lors à « la politique des barrages ». Ayant pour ambition de développer un secteur moderne performant, cette politique se fixa pour objectif-symbole l'irrigation d'un million d'hectares à l'horizon 2000, et pour y parvenir prit la voie de la grande hydraulique, c'est-à-dire l'édification d'imposants ouvrages de retenue d'eau, et l'équipement à leur aval de périmètres appelés à être les foyers privilégiés du développement recherché. Ce fut une politique volontariste, globale, et cependant éminemment sélective, puisque par nature, elle se proposait de concentrer d’énormes ressources sur des « périmètres » qui ne pouvaient tout au plus guère représenter plus du dixième des terres cultivables, et par là-même abriter une proportion équivalente de la population rurale du pays[4].
Cependant, comme une telle politique exigeait de lourds investissements publics, et compte tenu de la situation financière du pays, elle devait être largement financée par des emprunts externes, lesquels devaient bien être remboursés en devises. C’est cet argument qui allait permettre de « boucler » le modèle : Sur les précieuses terres aménagées par l’État et irriguées à partir des grands barrages, il fallait privilégier les cultures destinées à l’exportation non seulement parce qu’elles étaient sensées mieux rentabiliser les investissements, mais aussi parce qu’elles devaient générer les devises si nécessaires au remboursement de la dette. Ainsi, à son tour, la politique des barrages allait pour une bonne part s’identifier au « modèle agro-exportateur ».
Toujours est-il qu’au service de cette politique, l’État s'était appliqué des décennies durant à investir lui-même massivement dans les infrastructures de base, organiser les conditions d'exploitation des terres ainsi mises en valeur (aménagements fonciers, plans d'assolement, encadrement technique et logistique…), distribuer primes et subventions pour favoriser l'intensification de la production, assurer une quasi-défiscalisation du secteur, accorder les crédits nécessaires, signer les accords commerciaux préférentiels pour l’ouverture des marchés extérieurs, mettre en place une politique des prix conciliant les intérêts des producteurs et ceux des consommateurs.
Il faut ajouter que jusqu’aux années 1980, ce modèle agro-exportateur coexistait plus ou moins avec une certaine volonté de recherche de « l’autosuffisance alimentaire » (puisque telle était l’expression et le concept en cours alors), notamment à travers le développement de productions nécessitant l’irrigation mais permettant la satisfaction de la demande interne, telles les cultures fourragères pour le lait, la betterave et la canne à sucre, quelques céréales (maïs et blé tendre) …
Mais les années 1980 marquent un tournant, avec la vague néolibérale qui submerge le monde. Dans les pays en développement, elle prend concrètement la forme de politiques dites « d’ajustement structurel », étroitement contrôlées par les Institutions financières internationales, puisque liées à des programmes de rééchelonnement de la dette qui n’avait pu être honorée. La politique agricole, jusqu’alors volontariste et interventionniste, est fortement remise en cause par des « programmes d’ajustement structurels » qui s’articulent autour d'un double axe : le désengagement de l’État d’une part et l’accentuation de la libéralisation des échanges pour une pleine intégration dans la mondialisation d’autre part. Il s’agissait donc d’œuvrer à la redéfinition du rôle des organismes publics d'intervention et la soumission de leur gestion aux impératifs du marché, l'élimination des obstacles aux échanges intérieurs et extérieurs (monopoles, quotas), la suppression des subventions aux facteurs de production et l'affirmation d'une politique de "vérité des prix" à la production et à la consommation[5].
Ces politiques de désengagement de l’État et de libéralisation des échanges se sont poursuivies après la fin officielle des programmes d’ajustement structurel en 1993, notamment à travers la signature d’un nombre impressionnant d’accords de libre-échange et la libéralisation des marchés et des prix, de produits alimentaires en particulier[6].
Dans le cadre de cette orientation générale, deux mouvements de fond, qui ne vont cesser d’être confirmés par la suite, méritent d’être examinés parce que nous en subissons aujourd’hui les implications. En fait ils ont constitué le ferment d’une crise annoncée.
Le premier mouvement de fond, engagé avec la libéralisation des assolements dans les zones irriguées, est sans doute l'un des changements majeurs, qui n’a pas tardé à conduire dans certaines régions à des reclassements dans les choix des agriculteurs. La libéralisation des assolements a en effet entraîné la régression des superficies consacrées à des cultures de base stratégiques, au profit de spéculations à rentabilité plus élevée et plus rapide. Cette orientation a été d’autant confortée par la nouvelle conception de la « sécurité alimentaire » imposée par la Banque mondiale, laquelle nous rassurait que celle-ci était désormais obtenue sur le marché mondial, et qu’il suffisait d’exporter toujours plus pour éloigner le spectre de l’insécurité alimentaire. De surcroît, tout au long de la décennie 1990 et jusqu’en 2005, les cours mondiaux des principaux produits alimentaires étaient assez bas, ce qui favorisait le pari sur l’approvisionnement à partir des marchés mondiaux plutôt que sur la capacité à développer sa propre production, à même d’améliorer l’autosuffisance nationale. Tout cela a contribué à nourrir une certaine irresponsabilité des gouvernants à l’égard de la question alimentaire, désormais réduite à une simple question de devises qu’on peut se procurer… en intensifiant les exportations !
Mais si ces défaillances sont demeurées persistantes jusqu’à nos jours, une évolution encore plus inquiétante a concerné l’exploitation, ou plutôt la surexploitation des ressources hydriques, dans le secteur agricole en particulier, qui est utilisateur de pas moins de 87% des quantités disponibles dans le pays . Effectivement, en ouvrant dans les périmètres irrigués la voie à un accroissement considérable des surfaces consacrées aux cultures –rentables- d’exportation, la libéralisation des assolements a généré par là-même une pression plus forte sur les ressources hydriques disponibles, puisqu’on sait que ces productions sont souvent fortement consommatrices d’eau . Plus grave encore, depuis une vingtaine d’années, on assiste, hors des périmètres irrigués, à un mouvement d’extension démesurée et souvent anarchique de l’irrigation, dite « privée », par les eaux souterraines. Cette pratique s’est d’autant plus étendue qu’elle n’a quasiment guère été entravée par des contraintes institutionnelles ou réglementaires, les autorités faisant alors très souvent preuve d’un laxisme coupable . Elle s’est aussi largement développée parce que, de surcroît, et comme on y reviendra plus loin, elle a bénéficié d’une forte subvention de l’État ! En effet, profitant du fait que le gaz butane de-meure parmi les rares produits de large consommation en-core fortement subventionnés par l’État via la Caisse de compensation, de nombreux agriculteurs, souvent égale-ment exportateurs, se sont hâtés de tirer avantage de cette aubaine pour développer leur système d’irrigation, en puisant à bon marché l’eau de la nappe phréatique !
Ces germes de la crise annoncée étaient déjà à l’œuvre avant l’avènement du Plan Maroc Vert (PMV). Mais celui-ci va amplifier une dynamique, avec ses dérives, engagée de-puis longtemps.
Réalisé par un bureau d’étude étranger en moins de 5 mois et dans une opacité quasi-totale, le PMV avait été lancé en 2008 . D’emblée, il affichait son ambition de ré-habiliter l’agriculture, la doter des moyens dont elle avait manqué et en faire le « principal moteur de croissance et de lutte contre la pauvreté au Maroc » à l’horizon 2020. L'impact attendu à l’horizon 2020 était ambitieux, tant au niveau de la croissance du PIB que de l’emploi ou encore du revenu des ruraux.
Cette stratégie adoptait une approche globale et reposait sur deux piliers qui reproduisaient en fait le vieux schéma dualiste hérité de la colonisation et rebaptisé avec de nouvelles appellations, les « piliers » 1 et 2. Le pilier 1 visait à développer une agriculture moderne, compétitive et adaptée aux règles du marché, grâce à une nouvelle vague d’investissements privés, organisés autour de nouveaux « modèles d’agrégation ». Le pilier 2 quant à lui devait être celui de l’agriculture dite « solidaire », avec une approche orientée vers la lutte contre la pauvreté, par l’amélioration du revenu agricole des exploitants les plus fragiles, notamment dans les zones défavorisées ou périphériques. Par ailleurs étaient également prévues des actions « transversales », destinées à créer un environnement plus favorable à l’investissement et la croissance, telles la mise en concession des terres collectives et domaniales, la modernisation de la distribution, l’accès aux marchés étrangers, le renforcement de l'interprofession, la ré-forme du Ministère de l'Agriculture et des fonctions d'encadrement de l'État…
Au niveau des productions, bien que le PMV affirmait qu'aucune filière n'était condamnée et que « toutes peuvent et doivent réussir », une liste limitée de filières était identifiée pour être érigées en « filières de croissance », à haute valeur ajoutée et haute productivité dans le cadre du premier pilier : agrumes, olives, maraîchage, horticulture, céréales, lait, aviculture et viande bovine. Si les céréales et les productions animales faisaient partie de ces filières à « privilégier », l’expérience et les faits montreront que ce sont surtout les premières (les fruits et légumes en somme) qui allaient bénéficier d’une attention particulière. Les autres filières pour leur part devaient se contenter de « l'accompagnement solidaire » du second pilier. En tout cas, le PMV prévoit dans le cadre de projet dits de « re-conversion » ou de « diversification » de réduire les sur-faces céréalières de 20% (soit près de 1.2 million d’hectares) pour y développer des plantations arboricoles censées être plus rentables et « moins sensibles à la volatilité de la pluie » …
Par ailleurs, il faut ajouter que le PMV se distinguait par le fait qu’il était le premier plan sectoriel à être décliné au niveau régional, puisque 12 Plans Agricoles Régionaux avaient été élaborés et mis en œuvre en fonction des possibilités et des engagements de chacune des régions du pays.
Enfin, en termes d’investissements, l’effort programmé par le PMV était considérable : 147 milliards de dirhams (dont 75 milliards pour le pilier 1, 20 milliards pour le pi-lier 2, et 52 milliards pour les actions transversales), à mobiliser en une douzaine d’années à travers 1506 projets (dont 961 pour le pilier 1 et 545 pour le pilier 2). En fait, les quelques 40% de l’enveloppe globale que l’État allait prendre en charge l’étaient sous forme de subventions directes, principalement aux investissements que le secteur privé était incité à réaliser. Ainsi, le Fonds de Développe-ment Agricole dont le budget stagnait entre 400 et 500 mil-lions de dirhams avant 2007, avait subitement vu ses dotations fortement augmenter, pour se situer à plus de 3 mil-liards de dirhams depuis 2015 .
Arrivé à son terme, le PMV a été relayé par la stratégie appelée « Génération Green » , pour la décennie 2020-2030. Cette dernière s’inscrit explicitement dans la continuité du premier, même si elle se veut porteuse d’une certaine inflexion de la politique agricole qui prend acte de ce qui a été reconnu comme n’ayant pu être (ou ayant été mal) réalisé par le PMV . En effet, le Roi avait reçu en octobre 2018 le principal responsable de ce plan pour lui demander de le « réviser », notamment en réaffirmant « l’importance d’intégrer les questions de l’emploi et de la réduction des inégalités et de lutte contre la pauvreté et l’exode rural au cœur des priorités de la stratégie de développement agricole » . Depuis lors, l’appréciation que chacun gardait est que le bilan dudit plan n’était pas une réussite éclatante . D’autant plus que le Monarque, dans son discours au Parlement la même année, avait insisté pour qu’une réflexion soit engagée « sur les meilleurs moyens à mettre en œuvre pour rendre justice aux petits agriculteurs, particulièrement en ce qui concerne la commercialisation de leurs produits, et la lutte vigoureuse contre les spéculations et la multiplication des intermédiaires » .
De sorte que lorsque Génération Green (GG) est officiellement lancée en février 2020 , on ne sera guère étonnés d’y retrouver « l’empreinte » des critiques plus ou moins officiellement reconnues auparavant : l’emploi, la jeunesse, la lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités, l’émergence d’une classe moyenne rurale, mais aussi au niveau des filières de production, les problèmes de valorisation des produits agricoles, de leur commercialisation… Plus concrètement, la GG pour sa part ne va reposer que sur deux piliers : le premier concerne « la priorité à l’élément humain », et le second « la pérennité du développement agricole ». Le premier pilier comporte quatre axes qui commencent tous par « Nouvelle génération de… » : de classe moyenne, de jeunes entrepreneurs, d’organisations agricoles, de mécanismes d’accompagnement. Quant au second pilier, il projette de consolider les filières agricoles, structurer et moderniser les chaînes de distribution modernes, améliorer la qualité de la production et l'adapter aux tendances agricoles et aux nouveaux modes de consommation, investir dans l'efficacité hydrique et énergétique afin de préserver les ressources naturelles.
Pour L. Zagdouni, GG 2020-2030 « semble traduire une inflexion de la politique agricole en faveur de “l’agriculture sociale et solidaire”, objet du pilier II du PMV », et les axes d’intervention qui traduisent cette in-flexion sont les « nouvelles générations » (de classe moyenne, de jeunes entrepreneurs agricoles…) . Cependant, pour le sujet qui nous occupe ici, celui de l’eau agricole et de sa gestion, M.T. Srairi considère que « l’idée première de Génération Green est de continuer sur (cette) voie du Plan Maroc Vert, celle de la plantation de plus d’arbres, avec plus de goutte à goutte, pour augmenter la production et les volumes à l’export » .
En effet, il faut de prime abord noter que dès la lecture des premières versions du PMV, chacun avait pu relever tant au niveau des « fondements » que des objectifs du PMV, un « oubli » de taille qui n’était autre que la préservation des ressources naturelles, parmi les « six fondements » initialement arrêtés pour soutenir le PMV . On avait du mal à comprendre une telle lacune quand on sait que toutes les recherches et toutes les études, marocaines et étrangères, s’accordaient sans mal et depuis longtemps sur l’ampleur de la dégradation des ressources naturelles au Maroc et les contraintes accablantes que cela impose à l’agriculture du pays . Comment bâtir une stratégie de développement agricole sans se préoccuper de son « mi-lieu », de ses « fondements naturels » que sont les sols, l’eau, les parcours, les forêts, le tout sous changements climatiques accélérés ?!
En réalité, cet « oubli » est tout à fait significatif parce que révélateur de la vraie nature et des objectifs réels du PMV. En effet, clairement, celui-ci adopte une approche techniciste qui se met au service d’un modèle qui n’est autre que celui de la « grande ferme » : un modèle ultra-productiviste, fortement utilisateur d’engrais, de pesticides, gaspilleur d’eau, et ne jurant que par les bienfaits de l’intensification, de la productivité et de la compétitivité. En cela au demeurant, le PMV ne faisait qu’accentuer et renforcer le choix pour le modèle agro-exportateur engagé quatre décennies plus tôt. En tout cas le modèle productiviste avait pourtant fait son temps même dans les pays du Nord qui l’avaient adopté au cours de la deuxième moitié du XXème siècle, tant ses conséquences écologiques s’étaient révélées catastrophiques, et ses risques pour la santé humaine et animale tout à fait préoccupants . N’étions-nous donc pas capables de tirer les leçons des expériences des autres ? Alors que partout il n’était alors question que d’agro-écologie, d’agriculture « raisonnée » et respectueuse de la nature, on pouvait légitimement se demander si l’on pouvait se permettre un modèle si destructeur des ressources naturelles dans un pays où précisément la dégradation de ces dernières apparaissait déjà si inquiétante ? Avait-t-on examiné l’adéquation entre les objectifs de production arrêtés et l’état des ressources disponibles et à préserver (l’eau en particulier) ? Avait-t-on ré-fléchi à un minimum de cohérence entre les besoins, notamment en eau, générés par les projections de production du PMV et ceux revendiqués par les mêmes projections des autres plans sectoriels (tourisme, industrie, eau po-table)?
Certes, une telle carence a pu assez rapidement être identifiée et, face à la perplexité générale, a fini par être plus ou moins « rattrapée », du moins formellement. Dans un document PowerPoint conjoint du Département de l’Agriculture et de l’Agence pour le Développement Agricole, daté du mois d’octobre 2010, un septième « fonde-ment » est discrètement rajouté, et intitulé « sauvegarde des ressources naturelles pour une agriculture durable » . En réalité, et au regard des faits constatés depuis, un tel ajout s’est pour l’essentiel réduit à de très généreuses subventions gratifiant l’acquisition de systèmes d’irrigation localisée, plus économe en consommation d’eau… Autrement dit, après « l’oubli », arrive le temps de l’excès.
Le PMV va donc « récupérer » le « Plan national d'économie d'eau en irrigation » (PNEEI), lancé en 2007 , et le doter de nouvelles ambitions et -plus encore- de nouveaux moyens. Et tout au long de la décennie qui allait suivre (pour une bonne part aujourd’hui encore), à chaque fois que les responsables sont interpellés sur la question de l’impact du PMV sur les ressources naturelles, leur réponse tient en quelques mots : le programme d’irrigation localisée ! Cette dernière a effectivement beaucoup progressé, puisqu’on est passé de 155 000 ha en 2008 à près de 700 000 ha actuellement . Une telle évolution est facilement compréhensive lorsqu’on connaît les conditions de financement du forage et du matériel de micro-irrigation, notamment l’ampleur des subventions publiques accordées en la matière par le Fonds de développement agricole : Jusqu’à 5 ha, un tel équipement bénéficie d’une subvention de 100%, et au-delà celle-ci s’élève à 80%. Pour les équipements acquis dans le cadre d’une agrégation, la subvention atteint 100% sans limite de surface . Sauf dans le second cas, la subvention revient donc à offrir le matériel quasi-gratuitement !
C’est ainsi que ce sont largement les grands et moyens agriculteurs qui ont le plus bénéficié de la subvention, tant elle reste consistante même « réduite » à 80% . Au niveau de certains petits agriculteurs, ayant bénéficié gratuitement du matériel, on a pu constater des signes du « syndrome de l’assistanat », en tout cas un manque de motivation à l’égard d’un investissement pour lequel ils n’ont gère fourni d’effort particulier et qui dans certains cas ne répond même pas à leurs propres souhaits . Ces mêmes petits agriculteurs ont çà et là fait l’objet de manipulations de la part d’intermédiaires peu scrupuleux, et dont la presse a rapporté des pratiques de corruption et de détournement de fonds publics .
Mais l’effet pervers le plus grave est, pourrait-on dire, éco-hydrique. En fait, nous avons déjà expliqué comment, dès les années 1980 et 1990, s’étaient développées des pratiques de surexploitation des nappes phréatiques. On peut noter à présent que le PMV a objectivement amplifié une telle évolution en favorisant l’acquisition quasi-gratuite d’une bonne partie des équipements d’irrigation, en maintenant la possibilité d’accès à la nappe phréatique dans des conditions illégales et à un coût modique (puisque subventionné à travers le gaz butane, en plus des coûts de forage également pris en charge), et enfin en encourageant les productions dites « à haute valeur ajoutée », lesquelles sont le plus souvent aussi des productions fortement utilisatrices d’eau, et principalement destinées à l’exportation. Diverses études, notamment dans la plaine du Saïss, ont montré que, en l'absence de contraintes sur la ressource, les agriculteurs préfèrent apporter un excès d'eau afin d'éviter tout stress et pertes de rende-ment potentiel, de sorte que les pratiques de sur-irrigation, voire de gaspillage pur et simple d’eau, sont fréquentes, avec des efficiences d'irrigation à la parcelle entre 25% et 90% . M.T. Sraïri considère que les taux de subvention à la micro-irrigation, très élevés, ont accéléré l'adoption de cette technologie mais pas sa maîtrise technique .
Au final, avec l’irrigation localisée, on prétend économiser l’eau, alors que, en étendant les surfaces irriguées et en irriguant plus souvent, avec l’accélération des cycles de cultures, c’est le contraire qu’on obtient : Au lieu d’économiser l’eau, on surconsomme les volumes encore disponibles . C’est ce qu’il est convenu d’appeler « l’effet rebond », voire le « paradoxe de Jevons » lorsque l’effet est encore plus marqué . En tout cas, le résultat au niveau de l’état de la ressource est bien une baisse tout à fait inquiétante du niveau des nappes dans la plupart des bassins hydrauliques du pays. Contrairement à l’objectif affiché d’une économie d’eau comprise entre 0.8 et 4 mil-liards de m3 d’eau, et alors que les ressources hydriques souterraines sont estimées à 4 milliards de m3 par an, le volume prélevé est évalué à 5.11 milliards de m3/an (dont 4.3 milliards pour l’irrigation). De sorte que la surexploitation des eaux souterraines, autrement dit le déstockage des nappes, s’établit annuellement à 1.11 milliards de m3, « l’équivalent de 22% du volume prélevé et de 28% du volume renouvelable » . Dans la plaine du Saïss à titre d’exemple, le nombre de puits et péages était passé de 900 à 12 000, soit une multiplication par 13 en 35 ans (entre 1980 et 2015), impliquant une surexploitation annuelle de l’ordre de 100 millions de m3. La nappe de Chtouka, dans la région du Souss-Massa, a vu son niveau piézométrique diminuer de 30 mètres en 30 ans (1993-2023), alors que la baisse « n’avait » été que de 8 mètres au cours des 30 an-nées précédentes (1970-1993). L’aquifère de Haouz Mejjat pour sa part a accusé une baisse encore plus importante, de 55 mètres entre 1999 et 2021, soit au rythme de 2.5 m/an .
Sur le terrain, cette stratégie a donc plutôt conduit à une substitution accélérée de cultures hivernales, alimentées par les eaux pluviales (les céréales, l’élevage pastoral, les légumineuses, les fourrages, etc.), par des spéculations estivales dépendant entièrement de l’irrigation (arboriculture, maraîchage, fourrages, etc.). De nombreuses études de terrain et dans diverses régions du pays (Doukkala, Tadla, Saïss, Gharb, Haouz…), ont montré que cette « irrigation-là » a le plus souvent conduit à un changement d’assolement et de sensibles augmentations de consomma-tions par hectare au niveau de l'exploitation . L’extension des surfaces arboricoles en particulier a non seulement ac-cru considérablement la demande d’eau, mais créé de sur-croît une demande durable et « rigide », puisqu’un arbre doit absolument être irrigué au moment opportun (notam-ment entre les mois de mai à octobre), faute de quoi c’est « le capital » qui est en danger et non seulement le « fruit », comme c’est le cas des cultures annuelles .
Plus encore, dans une sorte de fuite en avant, se sont fortement développées au cours des quinze dernières an-nées des spéculations connues pour leur caractère particulièrement hydrovore, tels les fruits rouges, la pastèque, l’avocat, les dattes … Pour la plupart de contre-saison et essentiellement destinées aux marchés extérieurs, ces nouvelles productions revigorent le « modèle agro-exportateur » et lui donnent un nouvel élan, avec cette fois cette circonstance aggravante que « nous exportons sous forme de fruits l’eau qui nous manque » . Des cas extrêmes de ces logiques sont illustrés par l’augmentation démesurée des surfaces cultivées dans des zones désertiques ou semi-désertiques, à l’instar de la pastèque dans les régions de Zagora ou de Tata, ou les extensions de palmeraies sur des centaines d’hectares, dans les confins des oasis de l’Est… De ce fait, le stress hydrique continue de s’aggraver, allant jusqu’à compromettre les possibilités d’accès à l’eau po-table pour les populations des centres urbains environnants, notamment au Sud et à l’Est du pays .
Autrement dit, « nous prenons de l’eau de la bouche de la population en surexploitant les eaux souterraines, pour faire un produit destiné à l’exportation ». En somme, une autre façon de « marcher sur la tête » …
On voit ainsi comment, paradoxalement, des équipements et des techniques ayant à priori pour objet d’économiser l’eau, et donc de réduire la pression sur les stocks d’eaux souterraines, peuvent aboutir à une pression encore plus forte sur ceux-ci, et donc à l’inverse de l’objectif recherché… Plus généralement, il apparaît clairement que la modernisation recherchée dans le secteur agricole est fort peu compatible avec les ressources en eau du pays. Paradoxalement, le PMV ( relayé depuis 2020 par GG), par sa générosité financière et son laxisme réglementaire , tend souvent à amplifier le problème de l’eau, et ce alors même qu’il prétend agir pour l’atténuer. En somme on a là une illustration flagrante de ce que F. Molle et O. Tanouti considèrent être un « coûteux malentendu » entre politique agricole et politique de l’eau .
En effet, il est maintenant tout à fait évident qu’il existe une contradiction fondamentale entre les choix du modèle agro-exportateur et l’état ainsi que l’évolution des ressources hydriques du pays. En encourageant, voire en finançant la surexploitation de ces dernières, le « modèle » a accéléré une fuite en avant vers une impasse dont tout un chacun mesure aujourd’hui la gravité. Selon le Conseil économique, social et environnemental, et pour tout dire, « La demande en eau est aujourd’hui supérieure à la quantité disponible en ressources naturelles renouvelables d’eau douce » . C’est dire en d’autres termes qu’un tel déséquilibre des « flux » entrants et sortants conduit inéluctablement à entamer dangereusement le capital, ce qui re-vient encore à dire, en l’occurrence, qu’après avoir large-ment surexploité nos ressources hydriques de surface, renouvelables, on en arrive à la destruction des « réserves stratégiques » que sont les nappes souterraines les plus profondes , et dont les rythmes de constitution, ou de re-constitution prennent des siècles, voire des millénaires…
En maintenant contre vents et marées les choix de production d’une agriculture intensive, de plus en plus incompatible avec la ressource hydrique disponible, la politique agricole accélère le pas pour aller droit dans le mur ! Car ce ne sont malheureusement guère les velléités annoncées et les quelques mesures partielles et remèdes palliatifs pris ces derniers temps, sous la pression des contraintes, qui risquent d’inverser les tendances lourdes, à l’œuvre. En effet, dans le cadre de la déclinaison de la stratégie Génération Green, les responsables nous annoncent qu’un dispositif de suivi des assolements et des cultures installées est mis en place, « notamment dans les zones irriguées, pour s’assurer de leur adéquation avec les potentialités régionales et les objectifs de production » . Par ail-leurs, en septembre 2022, les pouvoirs publics avaient fini par mettre fin aux subventions accordées pour les cultures d’agrumes, de pastèques et d’avocats, de sorte que, notamment, il n’est plus permis de bénéficier des généreuses aides de l’Etat pour investir dans l’irrigation localisée destinée à ces productions . Enfin, quelques mesures de restrictions des surfaces sont prises par les autorités locales dans quelques régions du Sud où « le problème de la pastèque » est devenu particulièrement sensibles .
Si de telles mesures indiquent une certaine prise de conscience par les responsables de la gravité de la situation et de la dimension des enjeux , on voit bien que leur impact risque d’être bien dérisoire, ne serait-ce que parce que les gros agriculteurs –responsables des prélèvements d’eau les plus importants- ont maintenant les moyens de se passer des subventions et, surtout, comme le souligne S. Belemkaddem, « parce que les grandes fermes qui pratiquent ces cultures intensives et irriguées existent déjà et suffisent à tout assécher » . Car au-delà de ces velléités, le fond du problème reste bien et toujours au niveau de l’orientation générale et majeure, en faveur d’une agriculture objective-ment hydrovore et partant outrageusement gaspilleuse d’une ressource hydrique dont le pays manque tant. Même si l’on retient l’hypothèse optimiste que de telles mesures finissent par avoir quelque effet, on voit bien que face au rouleau compresseur du « modèle agro-exportateur », l’image qui vient à l’esprit est que lorsque ce dernier prend l’ascenseur, les mesures supposées en limiter les dégâts prennent l’escalier !
L’alternative ne nous semble donc pas être dans les demi-mesures, les mesures de replâtrage ou les palliatifs qui peuvent aggraver le mal au lieu de le guérir. Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est de repenser de fond en comble nos choix fondamentaux en matière de politique agricole et de politique de l’eau. La problématique est telle qu’elle impose de nouveaux choix radicalement différents de ceux qui ont produit la situation actuelle. On se contentera ici d’esquisser les axes d’une alternative capable de mieux accorder les choix de politique agricoles avec les contraintes hydriques du pays.
Au niveau de la politique agricole, il apparaît maintenant clairement que ce sont désormais les choix de production qui devront nécessairement être subordonnées aux contraintes de l’eau et non l’inverse . Ces choix devraient donc intérioriser un meilleur équilibre entre l’offre et la demande hydriques existantes et potentielles. Ils devraient être déterminés par deux facteurs : l’un en amont et l’autre en aval. En amont, le critère devrait être la préservation des ressources naturelles et l’adéquation avec les contraintes et les possibilités existantes à ce niveau. Toute production dont les besoins en eau apparaitront peu compatibles avec les ressources disponibles au niveau de l’espace territorial concerné devra être purement et simplement écartée. Quel que ce soit par ailleurs leur attrait (économique, financier, voire alimentaire…), les cultures dont les besoins en eau dépassent les possibilités de l’écosystème concerné de-viennent malheureusement « un luxe » que l’on ne peut plus se permettre. En aval, ce sont les besoins du consommateur qui devront déterminer les choix de production. Car l’autre facteur à prendre en considération est évidemment celui de la souveraineté alimentaire, qui est aussi l’autre leçon retenue de l’expérience récente, notamment lors de la pandémie du Covid-19 . Ainsi, c’est la demande interne qui devrait orienter nos choix de production et non pas la demande extérieure.
Au total, à la politique du « tout-export » et du « déni des ressources », il faudrait substituer une politique de souveraineté alimentaire et de préservation des ressources naturelles. Il faudrait donc décliner au niveau de chaque espace pédoclimatique les choix de production en fonction de leur concordance avec l’état des ressources naturelles d’une part et les besoins de consommation intérieure et donc de souveraineté alimentaire d’autre part. Finalement, ce dont il est question est bien la recherche d’une double souveraineté : hydrique et alimentaire.
La politique de l’eau devrait également être entièrement repensée, dans une optique qui articule les actions simultanées sur l’offre et la demande en eau pour en optimiser l’équilibre et le rendement. « La politique des barrages » a connu ses heures de gloire, mais a également essuyé bien des déboires… En tout cas, alors que les barrages existants sont remplis à moins du quart de leurs capacités, et que les perspectives climatiques ne portent guère à l’optimisme, projeter - comme le fait le nouveau plan national de l’eau- la construction d’une cinquantaine de nouveaux barrages à l’horizon 2050, comme l’affirme M. Bazza, « n’a pas de sens et doit être révisé » . Ce dernier au demeurant con-firme seulement le point de vue qui avait été affirmé par le groupe d’experts dans leur Livre blanc sur les ressources en eau au Maroc, déjà cité . Cette propension à construire toujours plus de barrages est d’autant moins compréhensible que –comme cela a déjà été évoqué plus haut- depuis des décennies, d’énormes surfaces, « dominées » par les barrages mais non aménagées, donc irrigables mais non irriguées, témoignent de l’ampleur du gaspillage des ressources généré par une telle politique. C’est dire que s’il y a une priorité en la matière, c’est bien celle d’investissements tendant à résorber ce décalage entre sur-faces dominées et surfaces équipées, et que la Cour des Comptes a évalué à près de 160 000 ha . Il reste que la re-cherche d’un meilleur équilibre entre Grande hydraulique et Petite et moyenne hydraulique devrait nécessairement conduire à arbitrer en faveur de cette dernière, d’autant plus que, par nature plus intégrée dans l’espace où elle se déploie, elle apparaît aujourd’hui encore mieux adaptée aux contraintes hydriques variées sur le territoire national.
Naturellement, l’irrigation localisée devrait être réexaminée et soumise à de nouvelles règles et de nouvelles conditions. Sauf exception dûment justifiée, celle alimentée par les nappes souterraines devrait être urgemment inter-dite, et à l’avenir, de nouvelles autorisations ne devraient être accordées que dans le cadre de « contrats de nappe » mûrement réfléchis, concertés, et inscrits dans une vision d’ensemble garantissant la pérennité de la ressource hydrique. D’autres possibilités alternatives existent, tel le transfert d’eau, le dessalement de l’eau de mer, le traite-ment et la réutilisation des eaux usées, la collecte des eaux pluviales… Cependant, les spécialistes du domaine s’accordent généralement pour considérer que ce sont des possibilités « pouvant certes constituer des appoints non négligeables et stratégiques », mais qui restent « sans commune mesure avec le volume d’eaux conventionnelles » .
En définitive, peut-être que la question lancinante pour la prochaine décennie n’est autre que celle posée par les auteurs de cet article déjà cité ? Quelle est la priorité : battre des records d’exportation de tomates pendant 10 ans, ou avoir de l’eau à boire dans 10 ans ?
1 - Intervention du Chef du Gouvernement au Parlement, en date du 12 dé-cembre 2022 (https://www.cg.gov.ma/fr/node/10914).
2 - Selon le Chef du Gouvernement, la quantité moyenne d'eau par habitant est estimée en 2022 à 620 mètres cubes, et devrait diminuer à 560 mètres cubes en 2030, après avoir été d'environ 2560 mètres cubes dans les années soixante. Cf. « Intervention… », op.cit. La Banque mondiale pour sa part préfère parler de « situation de stress hydrique structurel (inférieure à 1 000 m3), se rapprochant rapidement de seuil absolu de pénurie d’eau de 500 m3 par personne et par an », cf. BM, Rapport de suivi de la situation écono-mique au Maroc : La reprise tourne à sec, Washington DC, 2022, p.15. Quant à M. Taher Sraïri, il est pour lui plus approprié de parler de « détresse hydrique », surtout dans les régions les plus arides du pays… Cf. M. Mich-bal, « M.T. Srairi : Stress hydrique : la stratégie ‘Génération Green’ va-t-elle tomber à l’eau ? » (Entretien), Medias24, 25.7.2022 : Stress hydrique : la stratégie 'Génération Green' va-t-elle tomber à l’eau ? - Médias24 (me-dias24.com). Enfin, sur le Site Nechfate, K. Himmich et A. Hatimy titrent ainsi un long article bien documenté : « Le Maroc, un pays bientôt sans eau ? », 3.2.2023, https://nechfate.ma/maroc-un-pays-bientot-sans-eau.
3 - Ibid. Par ailleurs, selon Le Livre blanc du « Groupe Eau » d’anciens lauréats de l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, les disponibilités moyennes des eaux de surface au cours de la dernière décennie 2010-2020 se situeraient à peine entre 10 et 15 milliards de m³, au lieu des 18 milliards encore officiellement avancés. De sorte qu’en fait, la dotation par tête serait déjà tombée en dessous du niveau considéré comme étant le seuil de « la pé-nurie d’eau absolue » (500 m3/habitant par an). Cf. « Groupe Eau »: Livre blanc sur les ressources en eau au Maroc - Pour une gestion durable assu-rant la sécurité hydrique du pays, Rabat, octobre 2022, https://www.academia.edu/105255229/Livre_blanc_sur_les_ressources_en_eau_au_Maroc.
4 - N. Akesbi, Evolution et perspectives de l’agriculture marocaine, Rapport, groupe thématique « Croissance économique et développement humain », 50 ans de développement humain et perspectives 2025, Cinquantenaire de l’indépendance du Royaume du Maroc, Rabat, 2005.
5 - Cf. N. Akesbi , De la "politique des barrages" à la politique d'ajustement, quel avenir pour l'agriculture marocaine? Revue Mondes en Développement, n°89/90, Paris- Bruxelles, 1995.
6 - Au cours des années 1990, les prix à la production et à la consommation des produits laitiers et des huiles oléagineuses, auparavant subventionnés, avaient été libéralisés. Par ailleurs, entre 1995 et 2005, le Maroc avait signé des accords de libre-échange avec plus d’une cinquantaine de pays, notam-ment avec ceux de l’Union européenne, les États-Unis d’Amérique, la Tur-quie, les États arabes… Cf. N. Akesbi, D. Benatya, et N. El Aoufi, L’agriculture marocaine à l’épreuve de la libéralisation, éd. Economie cri-tique, Rabat, 2008.
7 - N. Akesbi, « Les grands problèmes non résolus de l’agriculture maro-caine », Revue Medit, Mediterranean Journal of Economics, Agriculture and Environnement, Mediterranean Agronomic Institute of Bari, Ciheam, n°2, 2003 ; N. Akesbi, Maroc, Une économie sous plafond de verre, éd. Re-vue Marocaine des sciences politiques et sociales, Hors série 4, volume XXII, septembre 2022.
8 - Haut Commissariat au Plan, « Modélisation de la consommation en eau intersectorielle dans l’économie marocaine », Les Brefs du Plan, n°14, 18.9.2020, Rabat.
9 - Selon le Département de l’Agriculture, les besoins annuels moyens en eau d’un hectare de culture sont estimés à 8 000 m3 pour l’avocat, 3 800 à 4 300 m3 pour la pastèque (production précoce et de saison) et 12 000 m3 pour les fruits rouges. Ces besoins seraient même estimés entre 9 000 m3 et 12 000 m3 pour les agrumes, 4 000 m3 pour la pomme de terre et de 15 000 à 20 000 m3 pour le palmier-dattier en fonction de la salinité et du type de sol… Cf.
11 - F. Molle et O. Tanouti, « La micro-irrigation et les ressources en eau au Ma-roc : un coûteux malentendu », Alternatives Rurales, octobre 2017 (www.alternatives-rurales.org ).
13 - Ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime, Plan Maroc Vert : Stratégie de développement intégré de l’agriculture au Maroc, Doc. ppt., 14 avril 2008 ; Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime – Agence pour le Développement Agricole, Le Plan Maroc Vert : Stratégie et mise en œuvre, Rabat, octobre 2010.
15 - Cf. Rapport sur les Comptes spéciaux du Trésor, Rapport annuel accompa-gnant les rapports annexes aux lois des finances annuelles, 2015-2023, Mi-nistère des finances, Rabat.
16 - Dite aussi Al Jayl Al Akhdar, en arabe.
17 - Selon le Ministre de l’Agriculture d’alors, Chef du gouvernement actuel, «Génération Green» a été « pensée et lancée pour combler les lacunes, corri-ger les imperfections et renforcer les acquis du PMV », Cf. C. Jaidani, « Génération Green: la stratégie sectorielle doit combler les lacunes du PMV », Finances News Hebdo, 20.5.2023 : Génération Green: la stratégie sectorielle doit combler les lacunes du PMV (fnh.ma).
18 - K. Filali, Mohammed VI demande à Akhannouch de réviser son Plan Maroc Vert, Le Desk, 19.10.2018
19 - Cf. H. Kharroubi, “Génération Green 2020-2030” annonce la faillite de la mise en application du Plan Maroc Vert, Barlamane, 16.2.2020, https://www.barlamane.com/fr/generation-green-2020-2030-annonce-la-faillite-de-la-mise-en-application-du-plan-maroc-vert/
20 - https://www.maroc.ma/fr/discours-royaux/sm-le-roi-prononce-un-discours-louverture-de-la-1-ere-session-de-la-3-eme-annee.
21 - MAP, Le Roi Mohammed VI lance la stratégie "Génération Green" pour l'agriculture, 13.2.2020, https://www.medias24.com/le-roi-mohammed-vi-lance-la-phase-ii-du-plan-maroc-vert-7603.html. Voir aussi: R. Berrada, ‘Le Roi désigne de nouveaux objectifs à l'agriculture: classe moyenne rurale, jeunesse et emploi», Medias24, 14.10.2018
https://www.medias24.com/MAROC/ECONOMIE/ECONOMIE/186618-Le-Roi-designe-de-nouveaux-objectifs-a-l-agriculture-classe-moyenne-rurale-jeunesse-et-emploi.html .
23 - N. Hassani : « L. Zagdouni,: La crise hydrique interroge nos choix et orien-tations » (entretien), BAB (magazine de la MAP), mars 2022.
24 - M. Michbal, « M.T. Srairi : Stress hydrique… », op.cit., 25.7.2022. Pour notre part, nous avons estimé alors que la GG est « la réincarnation du Plan Maroc Vert. En clair, c’est un PMV II ! ». Cf. https://www.medias24.com/le-roi-mohammed-vi-lance-la-phase-ii-du-plan-maroc-vert-7603.html.
25 - Ces six fondements sont les suivants : 1. Rôle moteur de l’agriculture ; 2. Une stratégie différenciée selon le tissu cible (piliers I et II) ; 3. Adoption des modèles organisationnels d’agrégation innovants ; 4. Investissements massifs soutenus par l’aide publique ; 5. Réalisation de 1000 à 1500 projets de développement concrets ; 6. Intérêt pour toutes les filières sans exclusive. Cf. Ministère de l’Agriculture…, 2008, op. cit. (diapo n°13).
27 - H. Nargisse, Les écosystèmes agricoles et pastoraux ; état des lieux et voies d’évolution, Rabat, 2005 ; Haut Commissariat au Plan, Prospective Maroc 2030 : Quelle agriculture pour le Maroc ? Rabat, 2007.
30 - Lequel déjà s’inscrivait dans la continuité́ du Programme national de subven-tion à l'irrigation localisée de 2002, et dont l'objectif initial était la reconver-sion à la micro-irrigation de 114 000 ha. Cf. F. Molle et O. Tanouti, « La micro-irrigation et les ressources en eau… », 2017, op. cit.
31 - Le programme de modernisation des réseaux hydrauliques prévoit de déve-lopper l'irrigation localisée pour atteindre un million d'hectares irrigués en goutte à goutte à l'horizon 2030 ; Ch. Chaabi, « Sadiki : le Maroc compte doubler la production agricole tout en utilisant moins d’eau », Medias24, 5.4.2023 ( Sadiki : le Maroc compte doubler la production agricole tout en utilisant moins d’eau - Médias24 (medias24.com).
32 - Ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts, Fonds de Développement Agricole - Les Aides Finan-cières de l’État pour la promotion des investissements agricoles, éd. avril 2019.
34 - Ainsi s’exprimait à cet égard ce petit agriculteur : « l’État prend en charge la totalité des investissements alloués à l’irrigation par goutte-à-goutte du fo-rage en passant par le pompage jusqu’au bassin de rétention : il s’occupe de tout, on n’a qu’à garder les mains dans les poches ! »… cf. J. Chaudier, « Barrages à sec, agriculture assoiffée… », 2022, op. cit.
35 - PMV : Escroquerie par milliards, Assabah, quotidien en arabe, Casablanca, 4.11.2019 ; Le syndicat du PJD menace Akhennouch de dénoncer sa poli-tique agricole, Akhbar AlYaoum, quotidien en arabe, Casablanca, 15.11.2018 ; De nouvelles enquêtes révèlent le gaspillage de milliards dans des projets agricoles imaginaires, Site Al 3omk (https://al3omk.com/amp/126457).
36 - Le ministre de l’équipement et de l’eau a récemment déclaré que sur les 372.000 puits répertoriés, 90% ne sont pas autorisés (L’Economiste, 18.4.2023 - https://www.leconomiste.com/flash-infos/90-des-puits-repertories-au-maroc-ne-sont-pas-autorises ); Pour leur part, F. Molle et O. Tanouti expliquent que la réglementation sur les forages agricoles est con-tournée par le recours à des pratiques de fausse déclarations, de trafic d’influence à travers « les vendeurs de goutte-à-goutte », par le recours à des « soutiens au plus haut niveau », cf. « La micro-irrigation… », 2017, op. cit., p.12 ; Voir aussi : A. Collas, « Au Maroc, l’oued victime des « voleurs d’eau », Le Monde Afrique, 31.10.2022,
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/10/29/au-maroc-l-oued-victime-des-voleurs-d-eau-et-de-la-secheresse_6147836_3212.html.
37 - M. Benouniche & al., "Making the user visible: analyzing irrigation practices and farmers’ logic to explain actual drip irrigation performance”, Irrigation Science, 32(6), cités par Molle & Tanouti, 2017, op. cit., p.2 /406.
38 - H. Benadad, La surexploitation de l’eau par des fermes agricoles tuent les nappes phréatiques, Le 360, 7.8.2022, La surexploitation de l’eau par des fermes agricoles tuent les nappes phréatiques | le360.ma
39 - Le paradoxe de Jevons énonce qu'à mesure que les améliorations technolo-giques augmentent l'efficacité avec laquelle une ressource est employée, la consommation totale de cette ressource peut augmenter au lieu de dimi-nuer. Cf. Wikipedia,
https://fr.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_de_Jevons ; La Banque mondiale, dans son rapport de 2022, retient également ce « paradoxe de Jevons » en ce qui concerne l’effort d’irrigation localisée engagé dans le cadre du PMV, cf. Rapport de suivi…, 2022, op. cit., p.20 ; Voir aussi : H. Sadok, “Le dilemme de la technologie… et si Jevons avait raison ? », Revue marocaine de sciences politiques et sociales, 22.12.2022 Le dilemme de la technologie…et si Jevons avait raison ? Pr. Hicham SADOK | la revue ma-rocaine de sciences politiques et sociales (sciencepo.ma)
40 - Cf. Ch. Chaabi, Round up. Tout savoir sur la problématique des eaux sou-terraines au Maroc, Medias24, 12.7.2023
(https://medias24.com/2023/07/12/round-up-tout-savoir-sur-la-problematique-des-eaux-souterraines-au-maroc/. A. Hatimy, Comment les politiques d’économie d’eau assoiffent le Maroc, Nechfate, 14.5.2023 (https://nechfate.ma/comment-leconomie-deau-a-asseche-le-maroc/ ).
41 - F. Molle et O. Tanouti estiment que le déstockage global de l’ordre de 1 mil-liard de m3 est « très probablement sous-estimé si l'on s'en tient à l'absence d'actualisation des chiffres sur l'irrigation privée », laquelle avait été évaluée à 441 430 ha en 2004, et depuis ce chiffre n’a guère été modifié… Cf. Molle & Tounati, 2017, op. cit., p.6.
43 -C’est ainsi que lors de la sécheresse de 2022, des agriculteurs ont dû procé-der à l’arrachage de leurs arbres (quelque fois plantées depuis quelques an-nées seulement), notamment dans les vergers agrumicoles de l’Oriental, faute d’eau, du ciel mais aussi du barrage, et de la nappe souterraine… Cf. M. Michbal, « M.T. Srairi : Stress hydrique… », 2022, op.cit.
45 - Gh. Kadiri, Au Maroc, « il n’y a plus d’eau ni dans le ciel ni dans le sol », Le Monde, 18.2.2018 ; A. Collas, Au Maroc, « nous exportons sous forme de fruits l’eau qui nous manque », Le Monde, 10.10.2022. Dans ce même article, M.T. Sraïri donne la mesure de l’aberration : « On s’est mis à cultiver les agrumes dans des régions où le niveau annuel de précipitations ne dé-passe pas 200 millimètres, alors que ces arbres nécessitent un minimum de 1 000 millimètres. On a fait pousser des pastèques, composées à 95 % d’eau, dans des confins désertiques. On a planté des avocatiers, une culture tropicale, alors que notre climat est semi-aride ! ».
46 - A. Collas, « L’agriculture marocaine assoiffe le pays », Le Monde, quotidien, Paris, 9-10 oct. 2022, p.8.
47 - A. El Rhazi, « Najib Akesbi : Nous avons rompu l’équilibre de nos écosys-tèmes » (Entretien), Le Desk, 23.2.2022 :
49 - Comme l'exprime un responsable du Ministère de l'Agriculture se référant au PMV et à la surexploitation de l'aquifère de la plaine du Saïss: "On est en train de subventionner le désastre", cf. Molle & Tanouti, 2017, op. cit., p.14.
50 - F. Molle et O. Tanouti , « La micro-irrigation et les ressources en eau au Maroc : un coûteux malentendu », 2017, op. cit.
51 - Conseil Economique Social et Environnemental, « Le droit à l’eau et à la sécurité hydrique, gravement menacé par un usage intensif », Rabat, 2020 (https://www.cese.ma/media/2020/11/Alerte-CESE-VF-1.pdf ).
52 - Sur tous les bassins hydrauliques du Maroc, seuls deux sont encore excé-dentaires, ceux du Loukkos et du Gharb dans le Nord du pays, et au rythme actuel de leur (sur)exploitation, ils ne devraient guère mettre longtemps pout tomber également en déficit… Selon M. Bazza, « L’état des lieux des res-sources en eau souterraines au Maroc aujourd’hui est tel qu’on ne peut pas les qualifier de réserves stratégiques… Elles ne peuvent désormais plus être reconstituées même en année de forte pluviosité, et donc leur épuisement est quasi-irréversible », cf. M. Bazza, ‘‘La sécurité hydrique et alimentaire… », 2022, op. cit.
54 - Cf. Pourquoi la production de la pastèque est interdite dans le sud du Maroc ? (lesiteinfo.com) ; La pastèque confrontée à une sécheresse historique et des restrictions de production (maroc-diplomatique.net).
55 - On revient de loin car n’oublions pas qu’en juin 2020 encore, le ministre de l’agriculture, Chef du gouvernement actuel, n’hésitait guère devant les députés au Parlement, à affirmer qu’il valait mieux cultiver la pastèque que l’orge puisque la première était autrement plus « rentable » que le second ! Cf. Réponse en vidéo (Chaîne Youtube Najib Akesbi :
https://www.youtube.com/watch?v=dKW9geImKFo ).
56 - Mouvement Maroc Environnement 2050, cité par A. Collas, « Au Maroc, nous exportons sous forme de fruits l’eau qui nous manque », Le Monde, 10.10.2022.
57 - « C’est à la politique de l’eau de s’adapter à la politique agricole, et non le contraire », soutenait Javier Cassou Diaz, de la Banque mondiale, lors d’une table ronde organisée à Rabat en juillet 2022 (cf. Michbal, « Stress hydrique… », 2022, op. cit.). C’est dire que, comme d’habitude, « la Banque » est toujours en retard d’une guerre…
58 - Nous nous focalisons ici sur la ressource « eau », mais il est évident que l’enjeu est celui de l’ensemble des ressources naturelles, notamment le sol, la forêt, les parcours, la biodiversité… dans le cadre d’un projet agro-écologique assumé.
59 - La souveraineté alimentaire affirme « le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires » (Via Campessina), et partant leur droit de concevoir et mettre en œuvre les politiques agricoles qui correspondent avant tout à leurs propres besoins avant de répondre à ceux du mar-ché mondial, et de se donner les moyens de les mettre en œuvre. Cf. N. Akesbi : Au-delà de la sécurité, la souveraineté alimentaire? EcoActu, 15.4.2020
(https://ecoactu.ma/najib-akesbi-securite-souverainete-alimentaire ).
60 - Et l’hydraulicien de haut niveau et ancien fonctionnaire international de la FAO d’ajouter : « La justification donnée par le département de l’eau pour la construction de ces barrages n’est pas suffisante et ne répond pas aux normes en la matière ». Cf. M. Bazza, ‘‘La sécurité hydrique et alimen-taire… » , 2022, op. cit. Voir aussi : R. Bousmid, « Sécheresse au Maroc : la stratégie des grands barrages mise en cause », Jeune Afrique, 15.2.2022 https://www.jeuneafrique.com/1313203/politique/secheresse-au-maroc-la-strategie-des-grands-barrages-mise-en-cause/ ; M. Mahmoud, « Sécheresse : les barrages sont-ils toujours viables ? » Telquel, 22.2.2.22, Sécheresse : les barrages sont-ils toujours viables ? (telquel.ma)
61 - En effet, on peut lire dans ce « livre » : « Il y a lieu de s’interroger sur les volumes supplémentaires pouvant être éventuellement générés par de nou-veaux barrages prévus dans les bassins du centre et du sud, sachant que les ressources en eau de surface dans ces bassins sont, ou bien déjà en grande partie mobilisées, ou en diminution, suite au changement climatique, d’où le risque de faible remplissage, déjà observé au cours des dix dernières an-nées ». Cf. « Groupe Eau »: Livre blanc… », 2022, op. cit.
64 - K. Himmich et A. Hatimy, « Le Maroc, un pays bientôt sans eau ? », 2023, op. cit.