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La crise géopolitique de l’eau
au bassin du Jourdain
Bouchra ELAOUNI
RÉSUME
Région aride par excellence, le bassin du Jourdain est confronté à des pé-nuries d'eau et la crise s’intensifie, en raison du changement climatique, de l'accroissement démographique, l'extension des surfaces irriguées, le déve-loppement industriel et l’incapacité de certaines sociétés à mobiliser et gérer efficacement les ressources.
En plus, bon nombre de pays de ces régions dépendent pour leur approvi-sionnement en eau de ressources extérieures à leur territoire comme la Syrie et la Palestine. L’eau est soumise à un système de partage inéquitable, et in-juste. Les Etats comme Israël, contrôlent les cours d’eau les utilisent en pre-mier et au mieux de leurs propres besoins agricoles et industriels.
Dans ce contexte, l’eau, qui conditionne la vie de tous les jours, est deve-nue une préoccupation croissante à l’échelle nationale et internationale, un enjeu géopolitique majeur. Et son partage constituerait alors, une source potentielle de conflits qui ne font qu’aggraver les tensions déjà présentes au sein des relations entre Etats ou communautés lesquelles poussées à l’extrême, pourraient déboucher sur de véritables « guerres de l’eau ».
ABSTRACT
Known as an arid region par excellence, the Jordan basin is facing water shortage crises intensified by climate change, population growth, and exten-sion of irrigated areas, industrial development and the inability of some com-panies to mobilize and manage resources effectively.
In addition, many countries in these regions depend for their water supply on resources outside their territory such as Syria and Palestine. Water is subject to an unfair and unjust sharing system. The States that control the rivers use them first for their own agricultural and industrial needs. In par-ticular Israel.
In this context, water has become a growing national and international concern, a major geopolitical issue. And its sharing would then constitute a potential source of conflicts that only aggravate the tensions already present in relations between States or communities, which pushed to the extreme, could lead to real «water wars».
Mots clefs : L'eau | Partage de l'eau | Politique hydrique | Infrastructures hydrauliques | Aquifères transfrontaliers | basins transfrontaliers | Conflit israélo-arabe | Géopolitique et paix | bassin du Jourdain.
Introduction
L'eau nous apparaît comme une ressource inépuisable, mais l'eau douce, indispensable à la vie, est une denrée rare. Ce n’est pas par hasard que Boutros Boutros-Ghali l’ex-secrétaire général des Nations – Unies, a prédit que « La prochaine guerre au Moyen-Orient sera menée sur l'eau, pas sur la politique » .
La planète Terre est recouverte à plus de 70% d’eau, dont 97,5 % est salée. Elle forme les océans, les mers inté-rieures et aussi certaines nappes souterraines. Toutefois, l’ensemble des eaux douces ne représente que 2,5% du volume total, soit environ 35,2 millions de milliards de mètres cubes dont les deux tiers sont inexploitables puisqu’ils sont sous forme de glace essentiellement en Arctique et en Antarctique. C'est donc moins de 1% de l'eau douce disponible qui peut satisfaire les besoins de l’humanité. Elle compte à la fois les eaux de surface (baies côtières, lacs, fleuves, cours d’eau) et les eaux souter-raines (aquifères).
Derrière ces chiffres, se cachent de très grandes dispa-rités en termes de qualité et de quantité, « l’or bleu » de-vant répondre à une demande croissante de la population mondiale. Au moment où la consommation d’eau a été multipliée par six, sa répartition est inégale ; un habitant sur trois n’a pas accès à une eau de qualité suffisante et chaque jour, des personnes, et surtout des enfants, meu-rent de maladies liées à l’eau .
Plusieurs pays sont menacés par l’épuisement de leurs ressources en eau potable, ils se trouvent dans ce qu’on appelle des zones de stress hydrique. Ces régions compor-tent des zones désertiques et arides, notamment le Moyen-Orient qui subit déjà des pénuries en eau dont les causes sont multiples et souvent cumulatives: le changement cli-matique, la pression démographique, l’urbanisation, la mauvaise gouvernance, l’industrialisation et l’irrigation in-tensive. En plus, beaucoup de pays de cette région dépen-dent pour leur approvisionnement en eau, de ressources extérieures à leur territoire. C’est par exemple le cas de certains pays comme la Jordanie, la Syrie, la Palestine, etc.
L’inégale répartition géographique de l’eau fait des res-sources hydriques une variable géopolitique. L’eau de-meure un objectif et parfois devient une arme pour les pays en amont qui contrôlent des fleuves transfrontaliers ; ainsi l’eau prend la dimension d'un outil politique tout à fait particulier. Les pays en aval sont dépendants d'un pays tiers pour une ressource dont ils ne peuvent se passer .
Se présentent à l'esprit les cas de la Turquie aux bas-sins du Tigre et de l’Euphrate, l'Éthiopie dans le bassin ni-lotique et Israël au bassin du Jourdain. Chaim Weizmann déclarât, dans une lettre adressée au Premier Ministre bri-tannique Lloyd George, que « Tout l’avenir de la Pales-tine dépend de son approvisionnement en eau pour l’irrigation et pour la production d’électricité ; et l’alimentation en eau doit essentiellement provenir des pentes du Mont Hermon, des sources du Jourdain et du Fleuve Litanie » .
L’eau est désormais associée à la notion de risque ; la « menace de soif » et les « guerres de l’eau », sont, des expressions qui s’invitent de plus en plus au débat comme données impérieuses.
Par conséquent, l’eau qui est un besoin vital à satis-faire, constituerait une composante non négligeable des tensions dans la région du Moyen-Orient, et un peu plus dans la vallée du Jourdain, voire une source favorisant l’émergence de conflits potentiels autour de certaines masses d’eau. Shimon Pérès, ancien président d’Israël, soutient « qu’il est probable que la prochaine guerre dans la région sera déclenchée, non point à cause du problème des frontières, mais à cause de la lutte pour le partage des eaux régionales » .
Le monopole des ressources en eau devient de ce fait un enjeu stratégique et politique pour les Etats, en l’occurrence au bassin du Jourdain. Ainsi, pour assurer la survie et la sécurité de leurs populations, les États de la ré-gion mettent en priorité, la gestion et l’approvisionnement en eau.
Les principaux enjeux de l’eau dans la vallée du Jourdain
L’eau est un droit humain, qui a pour but la satisfaction des besoins les plus élémentaires : eau potable, irrigation, électricité, etc, tous des éléments indispensables à la vie et au développement. Dans ce contexte, l’eau est un enjeu géopolitique majeur, vital à tout développement écono-mique. Son partage constituerait alors, une source éven-tuelle de conflits qui s’ajoute à des rivalités politiques et à des contentieux plus anciens entre États ou communautés, lesquelles poussés à l’extrême, pourraient déboucher sur de véritables «guerres de l’eau ».
Parmi les enjeux de l’eau, relevés sur le bassin du Jour-dain on cite :

  1. Le déséquilibre quantitatif entre la ressource hy-drique dans la région et la demande croissante pour les différents usages ;
  2. Préserver la qualité de cette ressource contre toute forme de pollution,
  3. Protéger et restaurer l’état des cours d’eau et des milieux aquatiques ;
  4. Intégrer les enjeux de l’eau dans les politiques d’aménagement du territoire ;
  5. Développer une politique de gestion commune à l’échelle régionale.
    Le bassin du Jourdain est donc, une région complexe qui concentre les difficultés que pose aujourd’hui la ques-tion de l’eau. Ce qui obligerait les États riverains à adopter, dans un esprit de stabilisation et de coopération, une poli-tique de développement durable interétatique, afin d’assurer une gestion raisonnable et durable de cette den-rée rare.
    Les enjeux posés par les grands bassins fluviaux de la région (Jourdain, Litanie, Yarmouk) et les nappes souter-raines nécessitent, en effet, une voie de solution possible en vue d’atténuer, voire de surmonter cette crise de l’eau. Ainsi, tensions et conflits internationaux inhérents à l'eau demeureront confinés à l'arène diplomatique et l'eau, du fait de son caractère vital, constituerait un outil de coopé-ration, voire un vecteur de paix dans la région.
    En définitive, ce sont précisément deux concepts, à sa-voir la notion de « risque » et celle de la « sécurité hy-drique » qui auront un rôle structurant dans notre dé-marche pour appréhender l'étude de la vallée du Jourdain. Cette approche multiforme tient compte non seulement de la géographie des ressources hydriques dans cette région, mais elle implique également leur importance tant sur le plan économique que social.
    Le but est de comprendre certains enjeux relatifs aux politiques des États et leurs stratégies de partage des res-sources hydriques de ce territoire afin de surmonter la problématique de la pénurie de l’eau et d’épargner à leurs populations, « le spectre de la soif ». .
    Il est question, au préalable, de présenter le tableau géopolitique de la vallée du Jourdain, afin de mieux com-prendre des enjeux liés au partage de l’eau. Ensuite, il s’agira d’analyser les politiques des États face à la rareté de la ressource hydrique d’une part et les démarches de gestion des conflits entre les États concernés d’autre part. Enfin, seront traitées les mesures de préservation de l’eau, l’un des facteurs essentiels de l’équilibre structurel et du-rable de cette région.
    I. Repères « géographiques» de la vallée du Jourdain
    L'un des défis majeurs que doivent relever les États ri-verains du bassin du Jourdain sans conteste celui de l’approvisionnement et de la gestion des rares ressources en eau. Face à la soif, les États seront livrés à des vio-lences et à des guerres interétatiques interminables. Des conflits hydriques intra-étatiques surgiront, plongeant les populations dans des guerres civiles. Cette situation im-pose une réflexion commune pour à la fois trouver une is-sue au conflit israélo-arabe et garantir un partage « équi-table » de l’eau. Ceci est d’autant plus vrai que la région n’est pas dépourvue de ressources hydrique mais plutôt caractérisée par une inégale répartition de l’eau dans l’espace et dans le temps.
    Eau et conflits dans le bassin du Jourdain

En effet, à travers son histoire, la région a connu plu-sieurs civilisations ; les premières à avoir d’ailleurs la maî-trise de l’eau. L’aridité du climat et la rareté de cette res-source ont renforcé la symbolique de l’eau chez ces civili-sations et dans les religions monothéistes. Les livres sacrés du Judaïsme, du Christianisme et de l’Islam, tissent un lien mystique avec l’eau. .
La description géographique de la vallée présente l'avantage de discerner les multiples provenances des res-sources hydriques et de déterminer leur répartition au sein des territoires israélien, jordanien, syrien, libanais, ainsi que sous la juridiction de l'Autorité palestinienne. .
Ces Etats se partagent les cours d’eau de la région. Il s’agit des grands bassins fluviaux, comme le Jourdain et les fleuves de moindre débit, à l’instar du Yarmouk, ainsi que des nappes aquifères présentes à Gaza ou en Cisjor-danie (les aquifères montagneux et l’aquifère côtier). C’est une région complexe qui concentre les difficultés que pose aujourd’hui la question de l’eau.
Dans la vallée du Jourdain comme partout ailleurs, les ressources hydrauliques ne sont pas uniquement d’origine fluviale. Contrairement à l’idée reçue, la région ne manque pas d’eau. Les aquifères souterrains et surtout les précipi-tations constituent des réserves non négligeables. En effet, cette région est caractérisée par une pluviométrie méditer-ranéenne très irrégulière tant dans le temps que dans l'es-pace, puisqu’elle est concentrée sur les hauteurs et les côtes méditerranéennes, loin des zones arides et déser-tiques (le désert du Néguev). .

L’addition des différentes ressources constitue ce que l'on désigne sous le terme de "bilan hydraulique". Cette démarche implique nécessairement la prise en compte de l'ensemble des "pertes", qu'elles résultent de l'évaporation, l'infiltration, ou les écoulements non récupérables.
Le bilan hydraulique met, de ce fait, en lumière une disparité entre les apports et les rejets d'eau, révélant ainsi des irrégularités significatives dans les précipitations, attri-buables à un taux d'évaporation élevé et aux pertes d'eau inhérentes aux fluctuations climatiques et géographiques de cette région.
Loin d’être abondantes, les réserves en eau du bassin du Jourdain proviennent de deux sortes de sources hy-driques : les ressources en eau de surface et les ressources hydriques souterraines dites aquifères .

  1. Les ressources hydriques de surface
    Le Jourdain prend sa source dans le Jabal El-Cheikh (Mont Hermon) au Liban et y parcourt 50 km avant d’entrer en Israël. Il est alimenté par des affluents du Li-ban, de Syrie, de Jordanie et d’Israël respectivement, le Hasbani, le Banias et le Dan, avant d’atteindre le lac de Tibériade, puis la rivière du Yarmouk et se jette par la suite dans la mer morte.
    Les capacités hydriques du Jourdain varient selon trois zones géographiques différentes les unes des autres, par leurs origines fluviales, la quantité d’eau de surface et sa qualité. Ainsi, l’espace de la vallée du Jourdain compte le Haut Jourdain ; la vallée centrale et le bas Jourdain.

    a. « Le Haut Jourdain »
    Située à une altitude de 2814 mètres, cette région de la vallée jouit d'une abondance d'eau, résultant de la con-jonction des précipitations et des nappes souterraines ni-chées au cœur du mont Hermon (Jabel Al-Sheik). Le Jour-dain est la source qui alimente cette portion du Haut Jour-dain, tandis que le mont Hermon s'étend sur une distance de plus de 40 kilomètres. À partir de ses pentes occiden-tales, émerge la Litanie, le principal fleuve du Liban, dont proviennent les sources des trois rivières (la Hasbani, la Dan et la Banias), qui se rejoignent pour former le Haut Jourdain. Cette région se distingue par une relative abon-dance, tant en termes de volume d'eau que de qualité, con-tribuant à hauteur de " 60 % du débit total du fleuve".
    La Hasbani prend sa source au Mont Hermon, en terri-toire libanais et descend vers la région du Galilée dans les territoires palestiniens occupés. Elle forme ensuite le Jour-dain en rejoignant la Banias et la Dan.
    Avec un débit de près de 138 millions de m3 d’eau par an, son volume est soumis à de fortes fluctuations an-nuelles et saisonnières, le faisant ainsi basculer de 236 à 52 millions de m3 d’eau. Un indicateur qui confirme la crise en termes de volume que subissent les eaux du Jour-dain
    Par ailleurs, il convient de mentionner que la rivière Banias, la plus orientale parmi les trois affluents princi-paux venant du nord du Jourdain, se trouve à une distance inférieure à deux kilomètres de la frontière israélienne, dans le cœur du Haut Golan syrien. Cette rivière est forte-ment prisée en tant que source prédominante du Jourdain. De type pluviométrique, son débit annuel varie entre 63 et 197 millions de mètres cubes et se démarque par la qualité exceptionnelle de ses eaux.
    Enfin, la troisième rivière est la Dan qui est alimentée par de plusieurs rivières secondaires. Elle a la particularité d’avoir un débit constant qui avoisine les 245 millions de m3 et compte 50% du « volume total du haut Jourdain ».
    La rivière Dan rejoint la rivière Hasbani en un point du nord d'Israël pour former un cours unique. Ces ressources d’eau permettent à la vallée centrale du Jourdain de béné-ficier d’une certaine abondance hydrique.
    b. La vallée centrale du Jourdain
    Le Jourdain s'écoule en direction de la vallée centrale et alimente le lac de Tibériade, lequel se pose comme un véritable réservoir d’eau. Le lac s'étend sur une longueur de 20 kilomètres et une largeur de 8 kilomètres, couvrant ainsi une superficie de 166 kilomètres carrés, tout en stockant chaque année entre 660 et 770 millions de mètres cubes d'eau douce.
    Cependant, la jonction de plusieurs facteurs humains et naturels, à savoir l’effet de l’évaporation, a drastiquement réduit la capacité du lac. Son niveau est descendu à plu-sieurs reprises ces dernières années.
    c. Le bas Jourdain
    Cette région est située entre le lac de Tibériade et la mer Morte. Elle est parcourue par plusieurs autres cours d'eau, dont le plus important est la rivière Yarmouk. Cette rivière prend son origine dans le Jebel Alawi et participe à l'approvisionnement du Jourdain, avec une capacité va-riant entre 400 et 500 millions de mètres cubes, ce qui en fait la dernière source d'"abondance hydrique" pour le Jourdain.
    La surexploitation des eaux du Jourdain par les États riverains, en plus de la forte évaporation, ont produit un affaiblissement de la capacité hydrique de cette zone. Avec une remarquable augmentation du degré de salinité, la situation est critique. La région est face à « une crise hydrique » qui pousse les États riverains à exploiter, voire épuiser les eaux souterraines afin de subvenir à leurs be-soins en eau.
  2. Les eaux souterraines
    Les réserves d'eau souterraine jouent un rôle significa-tif en matière d'approvisionnement en eau, elles sont su-rexploitées par les États. Le principal aquifère se situe dans les régions sous le contrôle d'Israël, en raison la structure géologique de la Cisjordanie est calcaire avec une couche imperméable. De plus, c'est dans cette zone que les précipitations contribuent de manière cruciale au renouvellement des eaux souterraines, qui s'écoulent prin-cipalement sous la surface de la Cisjordanie en direction du nord-est et de l'ouest d'Israël.
    Les eaux souterraines sont subdivisées en trois réser-voirs : l’aquifère montagneux du nord, l’aquifère monta-gneux occidental, et l’aquifère côtier.
    a. L’aquifère montagneux
    C’est le plus important en Israël et dans les territoires occupés de la Cisjordanie et Gaza. Il comprend plusieurs aquifères, avec une capacité totale d’environ de 660 mil-lions de mètres cubes d’eau par an.
    L’aquifère du nord prend son origine près de Na-plouse et s'écoule en direction de Jabal Fuqou’a et de la vallée de Jezréel au nord-est, avec un débit estimé à envi-ron 130 millions de mètres cubes par an. La grande partie de cet aquifère de montagne se trouve ainsi dans les terri-toires occupés. La plupart des eaux souterraines dans cet aquifère provient des précipitations internes aux territoires palestiniens, représentant ainsi 60% à 80 % de l'approvi-sionnement en eau de l'aquifère occidental.
    L’aquifère occidental est le plus important pour Israël, la Cisjordanie et la Bande de Gaza. Il coule vers la Médi-terranée et assure une production annuelle moyenne de 350 millions de m³.
    b. L’aquifère côtier
    En traversant la bande de Gaza, l'aquifère côtier revêt une importance moindre. La portion de la nappe phréa-tique qui s'étend sur le territoire de Gaza a une capacité totale de 60 millions de mètres cubes d'eau. Cependant, l'exploitation intensive de cette nappe par les colons israé-liens depuis 1967 a entraîné des infiltrations d'eaux sa-lines, principalement de l'eau de mer, ainsi que de nitrates provenant des eaux usées.
    En plus des ressources d’eau souterraines, les Palesti-niens de la Cisjordanie utilisent des puits artésiens qui constituent une source d’alimentation en eau avec 50 mil-lions de m3 d’eau par an, ainsi que les eaux de ruisselle-ment et des citernes de récupération des eaux de pluie .
    Quant à la Jordanie, ce sont les eaux souterraines qui sont les plus importantes pour l’utilisation en tant qu’eau potable ou pour l’irrigation, surtout qu’Israël pollue le cours d’eau du Jourdain. On assiste à une dégradation qualitative due à l'augmentation du taux des déchets des fermes piscicoles, d'engrais chimiques, des exfoliants, des insecticides et pesticides et des eaux usées infiltrés dans les sources et les nappes phréatiques.
    Il y a lieu de souligner, qu’il est très difficile de trouver dans des publications officielles des données exactes con-cernant les moyennes des crues et des débits du Jourdain. Les écarts entre les différentes sources peuvent atteindre les 10 % à 20 %.
    En raison de la nature stratégique de cette ressource, chaque État préserve les données concernant ses caracté-ristiques hydrologiques. De ce fait, lors des négociations sur des modalités de partage des eaux communes, les par-ties s’accrocheront aux chiffres qui leur sont les plus avan-tageux .
    Au-delà de l’inexactitude des données hydrogra-phiques, elles révèlent quand même une vulnérabilité des pays par rapport à l’accès et à la distribution de l’eau. Sa-chant que la moyenne générale annuelle du ratio indivi-duel en eau dans les pays du Moyen-Orient est de 1400m3 par an, alors qu’en Syrie, en Jordanie, au Liban, et en Israël le ratio est à 680m3 par an.
    II. L’inégale équation entre une demande croissante et une quantité d'eau décroissante
    La question de l’eau au Moyen-Orient présente des problèmes d’approvisionnement auxquels s’ajoutent des baisses inquiétantes de la moyenne annuelle en eau, sur-tout pour les pays du bassin du Jourdain. Différentes études scientifiques récentes ont mis en avant une préoc-cupante baisse des niveaux d’eau dans ces pays .
    Ces baisses ne peuvent être limitées au simple contexte hydro-climatique, mais également aux politiques de capta-tions des États riverains, afin de répondre à leurs besoins socio-économiques respectifs, aggravant ainsi la situation de rareté.
    Parmi les causes identifiées, on peut citer :
  • La croissance démographique ;
  • Le développement agricole ;
  • Les mouvements de migration et les tensions so-ciales ;
  • L’accès inégal à l’eau ;
  • Les effets du changement climatique.
    Le bassin du Jourdain est très sollicité par les politiques de captation des États riverains, au point que son débit est réduit à presque rien dans certaines régions, un phénomène d’autant plus accentué par les effets du changement clima-tique.
  1. Les effets du changement climatique sur la vallée du Jourdain
    L’impact du changement climatique commence à se faire sentir sur les ressources en eau de la région à travers une augmentation des températures et une diminution des précipitations.
    Les conséquences de ce changement climatique se dé-clinent en :
  • Une élévation du niveau de la mer ;
  • Une récurrence des périodes de sécheresse ;
  • Une évaporation plus rapide des précipitations ;
  • Un recul des eaux de la mer morte ;
  • Un impact non négligeable sur les économies locales.
    Le Moyen-Orient connait une sécheresse sans précé-dent qui a eu un impact plus profond en Syrie, en Jordanie et dans les territoires palestiniens , en raison d’une hydro politique inefficace d’une part et d’une forte croissance démographique pesant sur les faibles ressources hydriques de la région d’autre part.
  1. La croissance démographique, élément de pression sur les rares ressources en eau.
    Dans un premier temps, il est nécessaire de considérer l’ampleur des changements démographiques ayant trans-formé le bassin du Jourdain en l’espace de 40 ans.
    La région est marquée, depuis les années 70, par une transformation démographique importante. Le taux d’accroissement de la population dans les pays de cette ré-gion est relativement élevé : 1,6 % en Israël en 2021, 0,6% en Jordanie, 0,8% au Liban et 2,5% en Palestine .
    Cette transition démographique, toujours en cours, a de nombreuses incidences, à court et moyen terme, sur le de-venir de la région par rapport à la question de l’eau . Les ressources des fleuves, rivières et nappes souterraines ne suffisent pas toujours à répondre aux besoins agricoles, industriels et de consommation urbaine. Par conséquent, les pays sont confrontés à un déséquilibre entre leur "capi-tal" en eau et la croissance de leur consommation.
  2. Le développement agricole face à la réalité de l’appauvrissement en eau.
    Dans le secteur agricole, les pratiques sont de plus en plus agressives, visant une augmentation de la productivi-té. En plus de ces pratiques, l’usage de plus en plus inten-sif des pesticides a contribué à la pollution des terres agri-coles tout en augmentant le gaspillage en eau .

En Syrie, les initiatives de développement agricole, parfois ambitieuses, ont eu pour conséquence une détério-ration de la situation, marquée par des chutes parfois fou-droyantes du niveau des nappes phréatiques. Cela est en grande partie attribuable à la nécessité d'une irrigation ex-tensive, financée par des subventions.
Certains pays, tel qu’Israël, puisent largement dans les nappes souterraines, dont le renouvellement est très loin d'être assuré. Dans l’ensemble, plus de 70 % de la con-sommation d’eau est affectée à l’irrigation, surtout dans les colonies. L’État hébreu craint de modifier les quantités ainsi que les conditions d’accès à l’eau du secteur agri-cole, ce qui risquerait d’entraîner de profondes réactions sociales et politiques.
Par conséquent, la gestion trop dispendieuse de ces nappes a des effets néfastes sur les pays riverains, surtout, les territoires occupés de Palestine.
La bande de Gaza souffre des effets dramatiques du pompage excessif et des différentes pratiques agricoles sur les ressources souterraines, quiont entraîné des contamina-tions de l’aquifère littoral par divers composants toxiques tels que les sels et les nitrates, rendant des eaux de puits impropres à la consommation et favorisant la salinisation des terres.
La Jordanie accuse Israël de surexploitation et de dé-tournement des eaux du Jourdain. En plus, les parts cé-dées au royaume, suite aux accords de paix jordano-israéliens de Wadi Araba , sont polluées par des déchets toxiques et les eaux usées des usines.
La distribution inégale des ressources en eau, en plus de sa mauvaise gouvernance, pèsent lourdement sur les pays de la région. Les inégalités d’accès à l’eau sont régu-lièrement pointées du doigt par les populations actives dans le milieu agricole.

  1. Mauvaise gouvernance de l’eau
    Aux pressions quantitatives sur les ressources hy-driques, s’ajoutent une défaillance quant aux modalités de captation et de stockage des réserves d’eau.
    Les canalisations passant par des zones souvent arides et désertiques sont souvent à découvert, presque la moitié de l’eau transportée s’évapore. Le taux de déperdition est trop élevé pour une zone de « stresse hydrique ». On constate également un très mauvais état du réseau ancien d'adduction d'eau et d'égouts, et des retards en matière de traitement des eaux usées. C’est le cas notamment de la Syrie, des Territoires palestiniens et du Liban à cause de la guerre et surtout de la politique israélienne de captation.
    En Palestine, la vétusté du système de distribution en-traîne de nombreuses déperditions, voire des coupures plus ou moins longues suivant les régions. De ce fait, les habitants se trouvent obligés à faire des réserves d’eau dans des conditions d’hygiène souvent douteuses, ou même à acheter de l'eau au marché noir à des prix extra-vagants.
    De plus, en raison des infrastructures financées par l’État d’Israël, les implantations israéliennes en Cisjorda-nie perçoivent en moyenne plus d’eau que les Palestiniens, qui subissent des coupures répétées et arbitraires dans l’approvisionnement en eau, en particulier pendant la sai-son sèche. L’inégalité des prix vient renforcer cette dispa-rité quant à l’accès à l’eau. En effet, le palestinien doit payer son eau agricole au prix de l’eau potable alors que l’eau est fortement subventionnée dans les colonies juives. « Mekorot » fait payer, à des prix différenciés, le mètre cube pour usage domestique et celui à usage agricole aux israéliens.
    Pour, le Liban et la Jordanie, les zones rurales échap-pent largement à une distribution d’eau assurée par les services publics et reposent donc sur des systèmes an-ciens, inefficaces ou très limités en saison de sécheresse, provoquant alors ce qu’on appelle une « migration de la soif » vers les zones urbaines.
    Quant à la Syrie, les guerres et tensions dans la ré-gion sont à l’origine de la destruction d’un nombre impor-tant d’infrastructures hydrauliques. De plus, les afflux massifs de Réfugiés renforcent l’état de précarité d’une population face à une eau insalubre et impropre à la con-sommation laissant planer des menaces sanitaires graves, voire pandémiques (toxi-infections) comme le choléra.
  2. Migrations et tensions sociales
    La question migratoire devient de plus en plus pré-gnante dans les espaces touchés par la pénurie ou la rareté de l’eau.
    Sur le plan interne, les politiques locales et nationales ont une influence sur l’immigration environnementale. Le niveau de soutien reçu de l’État, l’accès aux opportunités économiques, l’efficacité des processus de prise de déci-sion et l’étendue de la cohésion sociale au sein et autour des groupes vulnérables sont les seuls moyens capables de soutenir les communautés subissant ces impacts environ-nementaux et climatiques.
    Rappelons que les conflits et les guerres dans la région sont à l’origine de flux de réfugiés. Un fait qui vient alourdir une situation déjà critique, ce qui interpelle les États de la région afin d’œuvrer pour une coopération ré-gionale plus efficace, capable de faciliter le traitement et offrir des solutions viables à cette crise de l’eau. Sinon, et face au manque de réponses adéquates, les migrations en-vironnementales finiraient par devenir un impératif. Elles se réaliseraient vers des villes déjà frappées par la précari-té et l’absence d’infrastructures d’accueil efficaces, ren-dant les conséquences de ces déplacements encore plus problématiques .
    La croissante rareté des ressources hydriques dans une région conflictuelle peut être un facteur facilitant le pas-sage vers des violences entre les États riverains.
    En effet, prenant sa source au Liban, le Jourdain sé-pare Israël des États arabes voisins, la Syrie et la Jordanie. La problématique de l’eau dans le bassin du Jourdain s’inscrit donc pleinement dans le conflit israélo-palestinien. L’enjeu de l’eau demeure un élément sécuri-taire en Israël. Pour elle, son futur et son développement dans la région sont étroitement liés à sa sécurité hydrique. Alors, elle déploie tous les moyens, notamment sa domina-tion militaire qui est un facteur de pression dans la gestion et le partage des eaux de la région.
    III. L’eau un enjeu crucial noyé sous d’autres litiges régionaux
    Dans cette région, au climat semi-désertique, la ques-tion de l’eau prend une dimension cruciale dans le proces-sus de paix régionale. « Conflits hydriques » ou « guerre de l’eau » sont de plus en plus présent dans les discours officielles, alors que dans les années soixante-dix, on par-lait davantage de crise du pétrole. De nos jours, cette ques-tion suscite de plus en plus de polémiques, surtout que le bassin du Jourdain souffre d’autres conflits régionaux.
    A. L’eau au bassin du Jourdain : une source de tensions dans une région conflictuelle
    De nombreuses études ont pointé le rôle non négli-geable de l’eau dans les contentieux hydro-politiques au bassin de Jourdain . Dans l’imaginaire politique des pays concernés, l’eau joue un rôle éminemment symbolique. Elle touche au sentiment national d’indépendance et de sé-curité. L’utilisation et l’aménagement des ressources sont, alors, un enjeu de première importance, et le Jourdain, fait l’objet de toutes les attentions, bien qu’il soit un fleuve aux dimensions et aux propriétés réduites :
  • Cours non navigable;
  • Difficilement aménageable;
  • Débits changeants et faibles;
  • Eaux fortement salées et polluées.
    En outre, les conflits et les tensions en cours en Syrie, au Liban, en Jordanie et en Palestine pèsent négativement sur la situation de rareté qui frappe la région.
    En Syrie, le conflit qui ravage le pays, a engendré une crise de l’eau sans précédent, les infrastructures liées à la distribution et à la gestion de l’eau ont subi des destruc-tions massives. En conséquence, les réseaux ont été en-dommagés durant les combats et les capacités de distribu-tion d’eau dans le pays ont été réduites de moitié .
    C’est ce que confirme Christophe Martin en précisant que : « Les grandes installations de distribution d'eau po-table, très centralisées, qui forment les huit principaux ré-seaux d'approvisionnement en eau de la Syrie, ont été gravement endommagées dans les hostilités. N'ayant pas été suffisamment utilisées et entretenues, elles se sont dété-riorées davantage ces dix dernières années. En cause éga-lement, le manque de pièces de rechange et de personnel compétent » .
    La migration de masse ainsi que l'af-flux des réfugiés dans les pays limitrophes se répercutent sur la crise hydrique déjà profonde .
    Au Liban, l'arrivée massive des réfugiés syriens accroît la pression qui pesait déjà sur les infrastructures hydriques d'approvisionnement, dont les installations délabrées pro-voquent la déperdition de l’eau. La population a connu une augmentation soudaine qui équivaut à près de 30%. Par conséquent, les pénuries d’eau sont fréquentes à cause de l’incapacité de production ou du manque d'entretien des stations et des installations.
    En Jordanie, la situation est très critique ; le pays est face à une vulnérabilité hydrique exponentielle. En effet, ces dernières années, la ressource hydrique est en cons-tante diminution, tandis que, la population jordanienne connaît une forte croissance démographique, couplé à un afflux de réfugiés syriens, ce qui a créé un déséquilibre no-table entre, les besoins d’approvisionnement et les res-sources hydriques disponibles. La Jordanie doit trouver des réserves supplémentaires à court terme.
    Les solutions envisagées reposent toutes sur de nou-velles ressources d'eau de surface, car les nappes souter-raines sont désormais largement surexploitées. Mais les vo-lumes à récupérer sont insignifiants puisque le Royaume Hachémite souffre également d’une sécheresse croissante liée aux changements climatiques ainsi que d’un partage inégal de l’essentiel de ses ressources hydriques avec ses voisins.
    À nos jours, Israël s’oppose fermement et par la force militaire à tout équipement du bassin et a tout projets hy-driques sur ce dernier. Israël tire de son côté 100 millions de m3 de ce cours d'eau depuis l'occupation du triangle du Yarmouk en 1967.
    Hormis quelques traités bilatéraux, Israël n’entretient pas, une diplomatie hydrique loyale avec ses voisins.
    L'accord de Wadi Araba , de 1994, laissait entrevoir certaines possibilités qui ne se sont pas encore toutes véri-fiées. Le traité de paix Israélo-jordanien reconnaît les droits du Royaume Hachémite sur les eaux du Jourdain, alors que, ces eaux sont entièrement exploitées par l'État hébreu.
    La Jordanie a commencé à recevoir, à première vue, de l'eau d'Israël après la construction d'une conduite reliant le lac de Tibériade au canal du roi Abdallah. Néanmoins, les parts cédées au royaume sont polluées par des particules toxiques et les eaux usées des usines israéliennes !
    La réalisation des ouvrages hydrauliques reste malheu-reusement suspendue à l'éventuel règlement de paix israé-lo-arabe, car elle implique une coordination entre les pays riverains en matière hydraulique.
    En Palestine, les attaques israéliennes visent, comme cible prioritaire, l’infrastructure déjà précaire des Palesti-niens, menaçant, par conséquent, leurs maigres ou faibles moyens de subsistance et faisant ainsi de l’eau une arme de persécution et de dissuasion. Nous assistons ici à une nou-velle forme d’apartheid envers les Palestiniens quant à leurs droits à l’eau.
    Au centre de telles tensions, l'eau, convoitée par tous, pourrait être l'un des principaux déclencheurs de conflits dans le futur. Le contrôle des ressources hydriques serait alors un facteur de violence, voire, des « guerres de l’eau » au bassin du Jourdain.
    Les États sont dans l’obligation d’imposer leurs straté-gies quant à l’accès et au partage de l’eau, quitte à user de la force. La supériorité militaire israélienne, lui assure la mainmise sur cette ressource au-delà de ses frontières, par voie d’occupation. Pour elle, sa sécurité hydrique condi-tionne son futur dans la région. L’eau demeure une priorité dans toutes les politiques de ses gouvernements successifs.
    B. L’eau, une ressource stratégique au cœur des préoccupations d’Israël
    L’eau est au cœur du conflit israélo-arabe ; dans cette région, la question de l’eau prend une dimension cruciale dans le processus de paix israélo-arabe. Les acteurs régio-naux considèrent que les guerres de l’eau sont éminentes, un fait acquis de la géopolitique régionale . Le roi Abdal-lah de Jordanie déclarait que "les conflits potentiels dans la zone ne naîtront pas du sol, mais de l’eau" .
    En effet, au-delà des enjeux territoriaux, politiques et religieux et par sa symbolique ancestrale et sa rareté, l’eau du bassin du Jourdain serait un enjeu dissimulé dans les conflits agitant le Proche-Orient. Des conflits, amplifiés par le mouvement sioniste et la création de l’État hébreu en 1948.
    Déjà en 1919, à l'issue de la « Déclaration BAL-FOUR», WEIZMANN demande lors de la conférence de Paris, que les frontières de la Palestine soient déterminées à partir de considérations hydrauliques en englobant les sources du Jourdain et du Litani, le Golan ainsi que le Yarmouk. Grâce à ses victoires militaires de 1948 et 1967, l'État hébreu a pu contrôler ces ressources hydrauliques.
    En 1959, Israël entame la construction d’un aqueduc pour détourner les eaux du lac de Tibériade, Israël occupe désormais l’essentiel de la vallée du Jourdain, la Cisjorda-nie et ses nappes phréatiques, et les plateaux du Golan riches en eau, résultat de la guerre de 1967 qui éclatât dans un contexte de tensions hydriques, le Liban, la Syrie et la Jordanie amorçaient des travaux de détournement du Jour-dain En outre, l'invasion du sud-Liban en 1978 lui a per-mis de prendre le contrôle des fleuves Litani et Wazzani. Une situation, qui a durée jusqu’ en 2000, avec le départ d’Israël du Sud du Liban
    En 1959, Israël entame la construction d’un aqueduc pour détourner les eaux du lac de Tibériade. En outre, l'invasion du sud-Liban en 1978 lui a permis de prendre le contrôle des fleuves Litani et Wazzani. Israël occupe dé-sormais l’essentiel de la vallée du Jourdain, la Cisjordanie et ses nappes phréatiques et les plateaux du Golan riches en eau et comme résultat de la guerre de 1967 qui éclatât dans un contexte de tensions hydriques, le Liban, la Syrie et la Jordanie amorçaient des travaux de détournement du Jourdain .
    Israël a ainsi augmenté son potentiel en eau et assuré sa sécurité hydrique en mettant fin aux projets hydrauliques arabes . Elle en a même fait un moyen de coercition.
    Par conséquent, sécurité d'approvisionnement et res-source en eau, sont les préoccupations sous-jacentes des conquêtes territoriales successives israéliennes, aux dépens des États voisins.
    À présent, Israël est maître de la totalité de la vallée du Jourdain jusqu'à la Mer Morte, mais surtout des aquifères montagneux de la Cisjordanie et de l'aquifère côtier de la bande de Gaza. Ces aquifères sont d'une importance ex-ceptionnelle dans une zone de « stresse hydrique ».
    Ainsi, la Jordanie se trouve privée d’une grande part des eaux du Jourdain, qu’elle doit partager avec Israël et la Palestine, ce qui suscite des rivalités entre les pays, et ce, malgré le traité israélo-jordanien du 26 octobre 1994. Ce traité prévoit que « Les parties s’accordent mutuellement pour reconnaitre à chacune d’elles une répartition équi-table des eaux du Jourdain et du Yarmouk » .
    Une situation qui oblige la Jordanie à mettre en place une politique de restriction de sa consommation en eau, et à faire face à ses besoins en exploitant ses nappes fossiles non renouvelables.
    Plus au nord, des tensions liées au partage des sources du Jourdain, opposent Israël, au Liban et à la Syrie, par rapport notamment au Dan, Hasbani, Wazzani, Banias. Quant au Golan, on est bien loin d’un accord entre Damas et Israël .
    La situation est encore plus critique pour les Palesti-niens de Gaza et de Cisjordanie, où l’accès à l’eau est for-tement contrôlé par Israël, tandis que les colonies juives opèrent des forages sans aucune restriction.
    Le monopole des ressources en eau est bien un enjeu stratégique et politique, voire même un moyen de coerci-tion pour Israël. En fait, la délégation de la gestion de cette ressource à Mekorot renforce cette idée . Il s’agit là d’une compagnie sous monopole étatique avec une totale maîtrise du système hydraulique et des réseaux de distributions des eaux. Elle permet aux autorités israéliennes de perturber les livraisons d’eau ; elle peut couper, à tout instant, l’eau aux Palestiniens, en fonction de l’évolution politique. Ce qui constitue une violation du droit international .
    Historiquement, Israël a, maintes fois, transgressé les conventions de Genève dans son exploitation de l’eau en l’utilisant comme outil de pression. De plus, les accords d’Oslo I et II, nécessitent une renégociation qui s’appuie sur la Convention de Genève de 1997 sur les droits relatifs à l’utilisation des cours d’eaux internationaux à des fins autres que la navigation, et en particulier sur les principes de l’utilisation « équitable et raisonnable » des ressources en eau, ainsi que « l'obligation de ne pas causer de dom-mages significatifs» aux pays voisins.
    Cependant, le droit international reste flou et les termes utilisés peuvent avoir plusieurs interprétations. C'est aux pays eux-mêmes de clarifier la signification précise de ces termes dans leurs bassins versants.
    En espérant des solutions à cette mainmise israélienne sur les ressources hydriques, les répercussions de la priva-tion de l’eau potable pour une partie importante de la po-pulation palestinienne sont nombreuses, particulièrement :
  • La dégradation de l’environnement ;
  • Les dangers pour la santé publique ;
  • L’atteinte au développement économique et social etc.
    De plus, le ciblage par Israël des infrastructures hydrau-liques impacte profondément la relation que les Palesti-niens entretiennent avec leur terre. En privant les agricul-teurs d’accéder à l’eau, Israël les pousse à abandonner leurs terres vidant ainsi des villages riches par leurs fa-milles et leur culture. On peut dire clairement qu’il s’agit d’une guerre menée contre les Palestiniens et dont la prin-cipale arme est l’eau, à travers laquelle l’occupant cherche à modifier la nature même de la société palestinienne.
    Pour Thomas Naff "Il ne peut y avoir de paix sans ré-gler les problèmes de l’eau et vice-versa […]. C’est l’eau qui déterminera l’avenir des Territoires occupés et, au-delà, la paix ou la guerre. Si la crise n’est pas résolue, il en résultera une plus grande probabilité d’un conflit entre la Jordanie et Israël, qui entraînerait certainement d’autres pays arabes ."
    Aujourd'hui, Israël bénéficie d’une «hydro-hégémonie », car elle dispose d’une importante supériorité militaire. Pourtant, cette prédominance, ne lui permet pas de résoudre le problème de pénurie auquel elle fait face, et qui devrait s’amplifier au futur.
    Il en est de même pour les Etats riverains, d’autant plus qu’ils ne…ne sont pas dotés des mêmes technologies hy-driques, ni même de politiques efficaces de gestion de leurs rares ressources en eau.
    Aussi, les États du bassin du Jourdain vont-ils devoir gérer un écart croissant entre la quantité d'eau disponible et leurs consommations nationales.
    Dès lors, il est important de faire progresser la ré-flexion et si possible des concepts communs. Ensuite, adopter une vision élargie qui prend en compte, toutes les solutions équitables et durables. Cela implique une poli-tique territoriale judicieuse et des garanties internationales pour résoudre un problème majeur qui menace la paix dans la région .
    IV. L’eau au bassin du Jourdain : Les perspectives d’une coopération régionale
    Selon les chiffres de l'ONU, d'ici à 2050, la consomma-tion d'eau augmentera de 44 % pour répondre aux besoins de l'industrie et de la population . L'organisation interna-tionale a également fourni des données relatives aux con-flits, soulignant qu'il existe environ 300 zones dans le monde où des conflits liés à l'eau sont prévisibles en 2025.
    A. Une hydro-diplomatie pour la paix au bassin du Jourdain
    Les pays du bassin du Jourdain gèrent l'eau en termes de distribution plus qu'en termes d'économie et de conser-vation. Dans un tel contexte, les Territoires palestiniens, la Jordanie, la Syrie et Israël sont en première ligne, des pays les plus menacés de pénurie. Quant au Liban, qui voit augmenter ses besoins en eau, devra résoudre le problème, en l’occurrence la bonne gouvernance et la qualité de ces ressources hydriques. Pourtant, la question de l’eau appa-raît d’une certaine manière secondaire et les différents États s’inquiètent, d’abord, de l’évolution du processus de paix régionale.
    L’accès à l’eau et sa disponibilité à court et à moyen terme sont de plus en plus importantes dans la région où les différents États sont touchés par la sécheresse. Ainsi, l'absence d'accords politiques, et de coopération dans le développement des nouvelles techniques hydrauliques, fe-ra de l'eau le principal déclencheur de conflits futurs.
    Dans ce cas, des solutions fortes doivent être engagées afin de sortir d’une situation critique. Au bassin du Jour-dain, comme partout ailleurs, les mesures sont nombreuses dans le but de combler les besoins des uns et des autres. S’il y a une réelle volonté politique pour une paix régio-nale, l’eau ne sera pas un obstacle. Tout est prêt pour la coopération avec la mise en commun des techniques, des connaissances et du savoir-faire.
    Autrement dit, les meilleures solutions sont celles qui recourent à l’entente et la négociation autour de solutions modernes et durables. Seule une coopération régionale qui vise la mise en place des mécanismes et des techniques in-novantes est capable de résoudre ces crises. Nous en ci-tons entre autres, le recours à des technologies plus adap-tées dans le domaine de la désalinisation de l’eau de mer ou des projets de recyclage, la conciliation entre dévelop-pement économique, l’aménagement du territoire et la ges-tion durable des ressources en eaux…, etc. Des techniques dont peuvent bénéficier tous les pays de la région.
    On peut classer ces mesures en plusieurs catégories : techniques, écologiques, culturelles, politiques.
  1. Des solutions techniques :
    La demande croissante en eau dans le monde augmente les risques de surexploitation et de contamination des sources hydrauliques naturelles. Dans ce contexte, les so-lutions techniques sont l’une des réponses à la pénurie d’eau et au stress hydrique. Les ressources ne seront plus limitées aux seules ressources conventionnelles, surtout, les ressources de surface, l’eau de pluie et les nappes phréatiques.
    En conséquence, les acteurs bénéficieront d’une plus grande flexibilité en matière de gestion de cette matière et essentiellement des eaux transfrontalières. Les technologies hydrauliques ont innové en matière de gestion et préserva-tion de l’eau, parmi ces solutions : la désalinisation, la réu-tilisation des eaux usées, l’extraction d’eau de l’air, le goutte-à-goutte, etc.
    Le dessalement
    Le dessalement de l’eau de mer à grande échelle pour-rait s’avérer être facteur déterminant. Malgré certaines bar-rières économiques, la technologie a la capacité de modi-fier les capacités hydrologiques dans la région. Autrement dit, et grâce au dessalement, les pays en aval dans le bassin du Jourdain, se verront, dotée d’une source non-naturelle d’eau douce en provenance des côtes maritimes. Cette nouvelle source hydrique transfèrerait le monopole hy-drique de l’amont en aval.
    Par conséquent, la géopolitique de l’eau changera sur le long terme. Surtout que le dessalement devient plus acces-sible et avec des prix de plus en plus abordables pour tous les États riverains. Dans cette optique, le gouvernement israélien a lancé, dès 1999, un programme de dessalement de l’eau de mer, qui a abouti à la mise en place de cinq usines. L’une des plus grandes usines de désalinisation au monde se trouve à Hadera en Israël.
    Si l’eau douce ne représente que 2,5% de l’eau pré-sente à la surface de la planète, l’eau de mer en constitue 97,5%. Le dessalement serait une alternative durable pour alimenter en eau potable les populations de régions cô-tières, soit 40% de la population mondiale. Pourtant, moins de 1% de la quantité d’eau potable produite dans le monde est issue du dessalement.
    La réutilisation des eaux usées
    La réutilisation des eaux usées, après épuration, consti-tue une solution alternative en faveur de la protection de la ressource. Aujourd’hui, seulement 2 % des 165 milliards de m³ des eaux collectées et traitées dans le monde sont réutilisées.
    Plusieurs pays ont déjà pris une avance considérable sur ce sujet. Avec l’objectif principal de fournir une quan-tité supplémentaire d'eau dont la qualité convient à un usage déterminé.
    Les traitements se font par filtration, microfiltration ou ultrafiltration selon les usages (urbains, industriels, agri-coles). Les eaux usées sont nettoyées à des niveaux proches de la qualité potable pour éviter la contamination, et leur réutilisation se fait en trois étapes :
    1. Récupération des eaux usées traitées,
    2. Traitement complémentaire de ces eaux usées, que l’on peut adapter aux usages. Il s’agit de se débarras-ser des impuretés dangereuses et toxiques.
    3. Utiliser l'eau à nouveau en fonction des niveaux de traitement :
  • L’usage agricole qui est sans doute celui avec le plus fort potentiel ;
  • L’usage municipal pour le nettoyage des voiries ou l’arrosage des espaces verts ;
  • La recharge artificielle de nappe;
  • La remise en état de milieux naturels.
    Cette solution est adoptée par la Jordanie, un pays pour lequel l’irrigation agricole représente 60% de la con-sommation des ressources d’eau douce. Quant à Israël, elle a depuis 2015 réussi à traiter et à recycler 86 % de ses eaux usées, pour les exploitations agricoles.
    Le goutte-à-goutte
    L’idée est d’amener l’eau directement aux racines des cultures à travers un réseau de tubes, de vannes et gout-teurs plutôt que par aspersion massive et ce pour éviter le gaspillage.
    L'irrigation goutte à goutte, et elle est considérée comme la meilleure et la plus simple en raison des économies de quantités d'eau, de la diminution de la propagation des mauvaises herbes et de la possibilité d'ajouter des engrais à l'eau d'irrigation qui atteignent directement les racines. Elle permet de réduire les consommations d’eau de 40% à 60%, puis ce qu’elle permet aux gouttes d'eau d'atteindre direc-tement les racines des cultures, à travers un réseau de tubes, de vannes et goutteurs plutôt que par aspersion mas-sive et éviter le gaspillage .
    Cette méthode d'irrigation est connue pour être l'une des nouvelles méthodes qui contribuent à conserver les ressources en eau en réduisant l’évaporation et le gaspil-lage d'eau et en améliorant l'efficacité globale de son utili-sation dans les activités agricoles et surtout, les cultures sur sols sableux et le milieu désertique comme celui du désert du Néguev.
    Mais de nouvelles études ont révélé les inconvénients qui pourraient être engendrés de la méthode d'irrigation goutte à goutte si elle est appliquée sur certaines terres agricoles dans des conditions météorologiques spécifiques, sans prendre en considération, l’étude des terres et les types de cultures dans lesquelles cette technologie serait utilisée.
    L’extraction d’eau de l’air
    Cette technologie permet d’extraire l’eau de l’air, une ressource inépuisable, grâce au refroidissement direct (di-rect cooling).
    De nombreuses parties du monde manquent d’eau douce dont la production est très coûteuse. Les commu-nautés proches de l’océan peuvent bien sûr dessaler l’eau de mer. Plus loin de la côte, la seule solution qui reste en-visageable, consiste souvent à condenser l’humidité at-mosphérique par refroidissement, par des processus qui exploitent les variations de température entre le jour et la nuit. La vapeur d’eau contenue dans l’air se condense en eau. Ce processus est le même que celui qu’on peut obser-ver sur des fenêtres mal isolées en hiver .
    La limitation des fuites d’eau et réhabilitation des réseaux d'adduction
    L’inefficacité des équipements appelle à une moderni-sation urgente des infrastructures. En effet, beaucoup de pertes au cours du transport dans les canalisations ou bien par évaporation, nécessitent une amélioration de l’efficacité des modes de gouvernance locale.
    Dans le monde, environ 30% de l’eau est perdue à cause des fuites et du manque d’entretien des canalisa-tions, ce taux atteint plus de 50% dans certains pays.
    Au bassin du Jourdain, les réseaux d’adduction en eau potable enregistrent 40 % de pertes dues aux des fuites contre 10 % en Europe.
    Les réservoirs d’eau de pluie
    Pour des raisons économiques ou environnementales et afin de réduire l'utilisation de l'eau du réseau et favoriser l'autosuffisance, des réservoirs sont installés pour utiliser l'eau de pluie. L'eau stockée peut être utilisée pour arroser les jardins, l'agriculture, les usages domestiques, etc, sur-tout quand les autres sources d'eau sont indisponibles, chères ou de mauvaise qualité.
    Les réservoirs d'eau de pluie souterrains peuvent éga-lement être utilisés pour la rétention des eaux pluviales dans les climats arides. Les citernes à eau de pluie sont souvent utilisées pour stocker l'eau pendant la saison des pluies, pour une utilisation ultérieure durant les périodes de sécheresse.
    Dans les territoires occupés de Palestine, Israël contrôle la collecte de l’eau de pluie et comme arme de répression, les forces militaires israéliennes détruisent les réservoirs d’eau palestiniens destinés à recueillir cette eau. Par con-séquent, les Palestiniens sont obligés de s’approvisionner en eau par tous les moyens possibles, notamment dans des bouteilles en plastique ou des barils. L’absence de coopé-ration entre les États aggrave la situation et un soutien in-ternational en la matière est vivement sollicité.
  1. Des solutions écologiques :
    Maîtriser l’eau urbaine
    Le ruissellement des eaux pluviales urbaines entraîne des polluants, métaux lourds, huiles, nitrates… se déver-sent dans les rivières et la mer. Les villes doivent protéger leurs écosystèmes et créer des microclimats pour atténuer la température, on parle de « villes sensibilisées à l’eau ».
  2. Des solutions culturelles :
    Rompre avec des pratiques traditionnelles désuètes et non durables par la réforme du système agricole est une mesure indispensable. Il faut choisir des cultures moins consommatrices d’eau et mieux adaptées au climat régio-nal. Autrement dit, il est impératif d’inciter les agriculteurs à adopter un mode durable de consommation d’eau. et sur-tout , limiter la surconsommation des eaux par les citoyens notamment, les colons qui suivent un mode de vie occi-dental dans leurs consommations en eau.
  3. Des solutions politico-juridiques :
    Une coopération régionale sur l’accès et la redistribu-tion des ressources en eau doit être enclenchée. L’eau n’est pas uniquement une ressource économique, mais aus-si un bien et un droit qui doit être accessible à tous. Les États du bassin du Jourdain devraient penser l’eau selon une vision politique et stratégique, compatible et étroite-ment liée aux autres politiques nationales. .
    Différents engagements et traités bilatéraux ont été si-gnés dans ce sens, mais l’absence d’un accord global entre les différentes parties concernées empêche l’affermissement du Droit International de l’eau, particuliè-rement, la distinction des droits relatifs des pays riverains, en amont et en aval .
    B. La place du droit international dans le règlement des hydro-conflits au Moyen-Orient
    La crise de l’eau fait partie des préoccupations de la communauté internationale eu égard au fait qu’elle con-cerne la plupart des États du monde. Au cours du siècle dernier, et face à diverses tensions liées à l’utilisation et au partage de l’eau, des négociations et des traités ont été ini-tiés afin de combler les lacunes juridiques de la Conven-tion des Nations Unies de 1997sur le droit relatif aux utili-sations des cours d'eau internationaux à des fins autres que la navigation .
    La prise de conscience de la nécessité de mettre sur pied, des instruments juridiques à même de régler les diffé-rends qui pourraient éclater entre les différentes nations, à propos de la rare ressource en eau qu'elles ont en partage, s'est faite de manière lente et évolutive. Ce long processus a abouti à l'émergence de deux conventions cadres :
  4. La Convention d’Helsinki de 1992 ;
  5. La convention de New York de 1997 relative aux cours d'eaux internationaux.
    Le nombre et l'étendue de ces traités restent limités, la plupart d'entre eux ne sont pas respectés. Nous citons à titre d'exemple : le Nil, le lac Tchad en Afrique, les bassins du Mékong, le Rio de la Plata en Amérique, etc.
    D'autres traités ont été également conclus en Europe, parmi lesquels figurent des traités relatifs au Rhin et au Danube.
    La convention, conclue à Helsinki, sous l'égide de la Commission Economique des Nations Unies pour l'Europe, le 17 mars 1992, a été le premier traité à codifier de ma-nière générale les règles gouvernant les cours d'eaux, la protection et l'utilisation des cours d'eaux internationaux.
    Cinq ans après et suite à un long processus de négocia-tions, la convention de New York de 1997, relative à l'uti-lisation des cours d'eaux à des fins autres que la naviga-tion, a été adopté. Elle témoigne de la difficulté de conci-lier les principes légaux et hydrologiques, de faire accepter la limitation de la souveraineté territoriale impliquée par l'unité hydrologique et de codifier l'application du principe d'équité.
    Une autre difficulté est liée à l’opposabilité de cette convention aux États, surtout que, trois pays (Chine, Tur-quie et Burundi) ont voté contre la convention. Ce cas montre les limites de la Convention Internationale de New York, en cas de relations fortement conflictuelles, l'applica-tion des principes établis, devient très difficile. C'est le cas du conflit entre la Turquie, la Syrie et l'Irak pour la réparti-tion de l'eau du Tigre et de l'Euphrate.
    De manière plus spécifique, cette convention, énonce des principes, très largement admis dans les relations inte-rétatiques, en ce qui concerne la gestion de l'eau.
    En somme, le droit international de l’eau reste flou et embryonnaire. Par leur caractère international, ces conven-tions, ont une faible opposabilité et les termes utilisés peuvent avoir plusieurs significations. C'est aux pays eux-mêmes de clarifier la signification précise de ces termes. Ce qui poussa certains à envisager un autre mode de régula-tion des conflits liés à la question de l'eau.
    L'eau, du fait de son caractère vital, constituerait un ou-til de coopération, comme c'est le cas dans de nombreuses situations pourtant à première vue hautement volatiles. A titre illustratif, l'Inde et le Pakistan, qui malgré leur rivalité fratricide, ont signé un traité sur le partage des eaux de l'Indus. Ainsi, tensions et conflits internationaux liés à l'eau demeureront confinés à l'arène diplomatique ; seule une hydro-diplomatie efficace, résoudrait la menace d’une « guerre de l’eau ».
    Conclusion
    Aujourd’hui, la sensibilisation internationale aux en-jeux de la préservation et du partage équitable de l’eau, constitue un encouragement pour une paix hydrique dans la région du bassin du Jourdain.
    Il est vrai que les conventions, accords et traités signés sont un aboutissement en soi, mais sans solutions durables et une éventuelle paix équitable et globale, la stabilité et la pacification de cette région, déjà durement traversée par les conflits, risquent de rester des vœux pieux .
    Autrement dit, c’est la paix, et non la guerre, qui procu-rera aux pays du Moyen-Orient les ressources indispen-sables à la réalisation de leurs besoins légitimes. Les meil-leures solutions sont celles qui recourent à l’entente et la négociation, autour de solutions modernes et durables.
    Une coopération régionale, encouragée par le droit in-ternational qui vise la mise en place de mécanismes ca-pables de résoudre ces crises, ou des technologies désalini-sation de l’eau de mer ou des projets de recyclage, dont la technique peut profiter à tous les pays de la région. Un en-semble de mesures qui contribueraient évidemment à éloi-gner le spectre d’une « guerre de l’eau ».

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    Glossaire
    L’eau douce : par opposition à l’eau de mer, est une eau dont la salinité est suffisamment faible pour pouvoir être consommée. Elle contient moins d’un gramme par litre de matières solides dissoutes (sels, métaux, oligo-éléments) alors que l’eau de mer compte près de 35 g de sels dissous et l’eau saumâtre en contient entre 1 et 10g.
    Eau potable C’est une eau que l’on peut boire ou utiliser à des fins domestiques et industrielles sans risque pour la santé. Elle peut être distribuée sous forme d’eau en bouteille (eau minérale ou eau de source, eau plate ou eau gazeuse), d’eau courante (eau du robinet) ou en-core dans des citernes pour un usage industriel.
    Stress hydrique : Selon l’OMS, le stress hydrique est dé-claré dans le cas d’une :
  • D’une situation de pénurie d’eau si une population dispose entre 1700 m3, et 10003 d’eau par habi-tant et par an
  • D’une situation rareté d’eau si une population qui dispose de moins de 1000 m3 d’eau ³par /habitant et par an.
    Bassins transfrontaliers : Eaux transfronta-lières, consistent en les aquifères et bassins lacustres et fluviaux partagés par deux pays ou plus. 263 bassins transfrontaliers de lacs et de rivières couvrent presque la moitié de la surface de la Terre. 145 États ont un territoire dans ces bassins et 30 pays y sont entière-ment rattachés
    La pénurie de l’eau : Également appelé « pénurie d'eau », voire « rareté de l'eau » dans les cas les plus extrêmes, le stress hydrique est une situation critique qui surgit lorsque les ressources en eau disponibles sont infé-rieures à la demande en eau.
    Une pénurie d'eau : C’est le moment où la demande en eau de tous les secteurs ne peut être entièrement satis-faite. L'impact total de tout l’usage (r)s affecte l'ali-mentation ou la qualité de l'eau. La pénurie d'eau in-tervient dans le cadre des arrangements institutionnels et environnementaux en vigueur.
    Un déficit hydrique : C’est la différence cumulée entre l'évapotranspiration potentielle et les précipitations pendant une période où ces der-nières lui sont inférieures à la première. Généralement, les averses brutales viennent compenser un défi-cit hydrique provoquant un stress, appelé stress hy-drique. Le déficit hydrique climatique (CWD) quanti-fie la demande évaporative dépassant l'humidité du sol disponible, où S = humidité du sol, AET = évapotranspiration réelle, D = déficit hydrique clima-tique.
    Un stress hydrique : correspond à une pénurie d'eau, ou un déficit des précipitations. Le concept relativement nouveau du stress hydrique est la difficulté à obtenir des sources d'eau douce pour une utilisation pendant une période de temps; il peut en résulter un nou-vel appauvrissement et la détérioration des ressources disponibles en eau.
    En écologie, quand il n'y a pas assez d'eau potable pour une population donnée, la menace d'une crise de l'eau est active. Ainsi, plus d'une personne sur six dans le monde est en stress hydrique, ce qui signifie qu'ils n'ont pas accès à l'eau potable.
    L’aridité du climat : Une aridité est une sécheresse importante d'un milieu ou d'un climat aride, sec, avec des précipitations annuelles inférieures à 200 mm. Elle traduit le manque d'eau dans le sol et de l'humidité dans l'air avec lequel il est en contact.
    Le débit des fleuves : Dans le cadre de l'eau, le débit correspond à un volume d'eau s'écoulant dans un cours d'eau par unité de temps à un endroit donné. Le débit s'exprime en m3/h, ou pour les pompes d'aquarium, en litres par heure (L/h). Pour un cours d'eau, il peut être un débit de base ou un débit de pointe (pour ses extrêmes).
    Le cours d'eau : C’est le nom générique des eaux cou-rantes qui circulent à travers un canal fixe; les cours d'eau sont nommés en fonction de caractéristiques de débit ou flux, de dimensions…, comme les fleuves, les rivières, les ravines, les ruisseaux, les torrents… Si la majorité des cours d'eau sont visibles en perma-nence à la surface, certains sont souterrains et d'autres encore sont temporaires.
    Les aquifères : Un aquifère est une couche souterraine de roches poreuses et perméables à l'eau, de roches frac-turées ou de matériaux non consolidés (gravier, sable ou limon) à partir desquels les eaux souterraines peuvent être extraites à l'aide d'un puits d'eau. La nappe aquifère en est le réservoir de stockage.
    Hydrauliques : Ce qui est hydraulique désigne, se rap-porte à, ou est actionné par un liquide se déplaçant dans un espace confiné sous pression.
    Hydraulique définit la partie et branche de la science qui s'occupe de l'étude de la pression des liquides, de la flottaison et son gradient, de l'écoulement des li-quides avec sa résistivité et des équipements hydrau-liques tel que les pompes.
    Hydriques : Ce qui est hydrique est relatif à l'eau, comme un bilan hydrique, une maladie hydrique, un potentiel hydrique ou un stress hydrique. L'eau est l'oxyde hydrique, un composé de corps simples incluant l'hydrogène. Le stress hy-drique correspond à un manque d'eau pour les orga-nismes.
    Un sous-bassin hydrographique : définit une zone dans laquelle toutes les eaux de ruissellement convergent, à travers un réseau de rivières, fleuves et éventuellement de lacs, vers un point particulier d'un cours d'eau (normalement un lac ou un confluent).
    Un sous-bassin versant est n'importe laquelle de plusieurs parties d'un bassin versant qui s'écoule vers un empla-cement spécifique.
    Le cycle hydrologique : qualifie le cycle naturel de l'eau, de l'atmosphère vers la terre et de celle-ci vers l'at-mosphère. Un cycle hydrologique est une partie du cycle de l'eau localisé et daté en un lieu et temps précis, en dressant un bilan hydrologique.
    Les cycles hydrologiques sont constitués de la succession des phases par lesquelles l'eau passe de l'atmosphère à la terre, pour ensuite retourner à l'atmosphère; c'est l'évaporation de l'eau à partir des terres, des mers ou des nappes d'eau continentales, sa condensation sous forme de nuages, de précipitations, son accumulation dans le sol ou à sa surface et sa ré-évaporation.
    Escarpement : Un escarpement est un cas particulier de falaise, formé par le mouvement d'une faille tectonique ou d'un effon-drement. Assez élevé, quasiment vertical, surplombant une étendue d'eau (mer, océan, lac) ou des terres plus basses. La plupart des falaises finissent par dépendre de leur base; dans les régions arides ou sous de grandes falaises, la pente est généralement une accumulation de roches détachées, tandis que dans les zones d'humidité plus élevée, les roches de la pente sont recouvertes d'une couche de terre compac-tée par l'humidité formant un sol.
    Le dessalement : Processus par lequel les sels miné-raux dissous dans l'eau sont éliminés. Actuellement, ce procédé, appliqué à l'eau de mer, est l'un des plus uti-lisés pour obtenir de l'eau douce destinée à la con-sommation humaine ou à des fins agricoles.
    Le dessalement de l'eau consiste en une extraction du sel de l'eau de mer ou des eaux saumâtres. Plusieurs mé-thodes peuvent être utilisées, par exemple la distillation, l'électrodialyse, l'échange d'ions et l'évaporation solaire suivie par condensation de la vapeur d'eau. Le dessalement ne doit pas être con-fondu avec la désalinisation qui concerne essentielle-ment les sols et non l'eau salée.
    La désalinisation est l'action d'extraction du sel d'un sol par des moyens artificiels, en général le lessivage. Elle est l'opération inverse d'une salinisation. Si le dessalement concerne l'eau de mer, la désalinisation concerne les sols. La salinité peut augmenter dans un sol par des processus naturels. Le taux de sel d'un sol est mesuré par son indice de salinité.
    La Filtration : Une technique permettant de procéder au passage d'un liquide ou d'un gaz à travers un appareil ou un mécanisme organique servant de filtre. La filtra-tion est aussi un moyen de stériliser des milieux li-quides ou des substances qui ne peuvent pas être chauffées. Il existe alors des techniques comme la microfiltration et l'ultrafiltration, avant d'arriver jus-qu'à l'osmose inverse.
    L'ultrafiltration : couramment abrégée en UF, est un type de technique de filtration au travers d'une membrane semi-perméable. Les industries chi-miques et pharmaceutiques, de fabrication de nourri-ture et boissons, et le traitement des eaux usées, em-ploient l'ultrafiltration afin de recycler les liquides ou de flux de valeur ajoutée aux produits plus tard.

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