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DE L’UTILITE DE L’ ONU ?

Par YOUNES Benmoumen

Récemment, on m'a demandé, à un poste frontière, mon métier et mon employeur. En écoutant ma réponse, mon interlocuteur m'a dit que l'ONU devrait être supprimée car elle ne servait à rien.

C'est difficile d'argumenter quand on a une file d'attente derrière soi et une vitre devant, aussi ma réponse m'est restée au travers de la gorge.

J'ai donc pris mon passeport et suis allé récupérer mon bagage, dans un état à mi-chemin entre la mélancolie et l'irritation.

La semaine dernière, une discussion avec Volker Türk, Haut-Commissaire aux droits de l'Homme, m'a rappelé cet incident, et tout ce que j'aurai voulu dire à ce poste frontière. En substance, ceci:

Si l'ONU ne sert à rien, pourquoi Israël veut éliminer l'UNRWA ?

Si l'ONU ne sert à rien, pourquoi le Secrétaire général a-t-il été déclaré personae non grata en Israël ?

Si tout ça ne sert à rien, pourquoi les magistrats de la Cour pénale internationale reçoivent autant de pressions et de menaces ?

L'ambition de créer un corpus de droit international, de le mettre en œuvre et de son sanctionner son irrespect, se heurte à bien des obstacles dont le premier est le plus évident : le système repose sur des Etats souverains, et ce sont le plus souvent les Etats souverains qu'il s'agit de contraindre.

On ne remplace par la violence des "Léviathans" par le droit uniquement parce qu'on signe des traités et des conventions, encore faut-il avoir les moyens de les faire respecter. Or, ce sont ces moyens même que l'on conteste sans cesse aux organisations multilatérales.

Leur paralysie n'est donc pas ontologique, elle est le reflet de l'état du monde.

Quand ont dit que l'ONU est "paralysée", cette paralysie n'est pas une déformation congénitale ou une malédiction divine, mais un résultat des efforts diplomatique d'un ou plusieurs acteurs, qui en ont l'intérêt et le pouvoir.

Cela m'amène à énoncer cette idée simple: seul le multilatéralisme donne la possibilité aux pays qui ne sont pas des puissances globales ou régionales d'avoir une voix et de la faire entendre au monde entier.

Seul le multilatéralisme ouvre la possibilité d'altérer la trajectoire des intérêts et de la force brute, par autre chose : la négociation, le droit international, la coopération.

Et face aux tragédies qui se déroulent devant nous et que nous n'arrivons pas à empêcher, il y a des gens dans l'ONU et dans les sociétés civiles de tous bords, et y compris en Israël, qui documentent les crimes qui sont commis, et qui viennent en aide aux victimes.

Je pense aux gens qui documentent pour ne pas oublier, pour prouver et pour obtenir justice.

Je pense aux plus de 220 collègues qui ont perdu la vie à ce jour entre Gaza et le Liban.

Je pense aux magistrats de l'ICC qui reçoivent des courriers de "grandes institutions démocratiques" qui les menacent de représailles personnelles.

Si on veut la justice, il est important de soutenir ces gens là, parce qu'en définitive, c'est leur vision du monde qu'on veut voir triompher.

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